J’ai découvert le rêve du celte de Mario Vargas Llosa il y a quelques années. L’histoire d’une figure de la rébellion irlandaise comme Roger Casement, ainsi que sa vie mouvementée à travers des expéditions pour dénoncer l’inhumanité du colonialisme ne pouvaient qu’être un livre pour moi !
Synopsis de Le rêve du celte
Le thème central de ce roman, conduit au rythme haletant des expéditions et des rencontres du protagoniste, est la dénonciation de la monstrueuse exploitation de l’homme par l’homme dans les forêts du Congo, alors propriété privée du roi Léopold II de Belgique, et dans l’Amazonie péruvienne, chasse gardée des comptoirs britanniques jusqu’au début du XXe siècle.
Personnage controversé, intransigeant, peu commode, auteur d’un célèbre rapport sur l’Afrique qui porte son nom, l’aventurier et révolutionnaire irlandais Roger Casement (1864-1916) découvre au fil de ses voyages l’injustice sociale mais également les méfaits du colonialisme qu’il saura voir aussi dans son propre pays. Au rêve d’un monde sans colonies qui guidera son combat, viendra ainsi s’ajouter, comme son prolongement nécessaire, celui d’une Irlande indépendante.
Tous les deux vont marquer la trajectoire de cet homme intègre et passionné dont l’action humanitaire deviendra vite une référence incontournable mais dont l’action politique le conduira à mourir tragiquement dans la disgrâce et l’oubli.
Un récit terriblement touchant
Colonialisme, cruauté et violence
Mario Vargas Llosa ranime une histoire douloureuse en cette fin de XVIIIe siècle et début du XIXe siècle. Alors que l’Empire britannique est immense, Roger Casement, aventurier, découvre l’Afrique. Notamment le Congo de Léopold II, souvent peu évoqué. Il va prendre en note l’ensemble des horreur qu’il y verra, car les colons n’hésitent pas à y faire régner la terreur. Il est intéressant de voir Casement évoluer de jeune homme idéaliste qui croit réellement à la mission civilisatrice des peuples européens vers une personne plus consciente de la réalité de situation des peuples africains. Ce sera suite à cette expérience qu’il écrira le rapport Casement, qui fera grand bruit.
Le livre, biographie romancée, ranime le passé violent des pays sous domination coloniale. Il y est donc question de racisme, de violence et de domination de manière assez crue. La partie en Amazonie est particulièrement dure à lire : torture, viol… On assiste au pire de la nature humaine à travers le regard de Casement et ses compagnons. Heureusement, l’humanisme teinté d’intransigeance de l’Irlandais permet de rendre la lecture plus supportable. Il est par ailleurs intéressant de voir comment la violence est traitée par les hautes instances des autorités britannique.
Roger Casement, un homme singulier
Casement est par ailleurs une personnalité bien plus complexe qu’il n’y paraît. Mario Vargas LLosa a une écriture simple et directe, mais fluide. Les changements dans le caractère et les croyances de Roger Casement sont subtils et bien décrits, ce qui permet par créer une connivence au fil du temps avec cet homme secret mais entier. Il semble toujours être à part de ses semblables, grand voyageur, incapable d’avoir des attaches hormis quelques femmes de son entourage, comme l’historienne indépendantiste irlandaise Alice Stopford Green. Sa fascination pour l’Irlande, tardive, marquera un point tournant dans son existence et une ancre à laquelle se rattacher.
Mais le plus grand secret de Casement demeure son homosexualité. A une époque où c’était très mal vu, Oscar Wilde a été condamné pour ses mœurs jugées contre-natures à la fin du XIXe siècle et bien plus tard Alan Turing a subi une castration chimique, il a tenu un journal sulfureux qui lui a valu une réputation déplorable. Difficile de dire jusqu’à quel point cette découverte a participé à sa condamnation à mort , mais cette fin laisse un mélange d’amertume et de tristesse. Pourquoi un homme qui a tant œuvré pour la dignité humaine a-t-il été condamné de cette manière ?
Un livre qui permet de mieux connaître l’histoire
Le rêve du Celte est vraiment une lecture éclairante ! J’ai beaucoup aimé le parcours de Roger Casement, qui couvre de nombreux questionnements : racisme, homophobie, droit des peuples à disposer d’eux-mêmes… L’homme dérange profondément les sociétés avides de richesses et de cruauté, car il s’acharne à enquêter et décrire toutes les horreurs qu’il croisera dans ses rapports. C’est également l’histoire d’un drame marqué par le disgrâce et l’infamie, et l’histoire d’un homme qui n’aura jamais vraiment trouvé sa place dans le monde.
Note : 16/20
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