C’est le temps du point lecture ! Ce mois de novembre a été assez satisfaisant avec des lectures variées, pas toujours très bonnes ceci dit. J’ai même pu lire un peu de littérature policière, cela faisait bien longtemps. Mais je suis une fois de plus rester dans la SFFF. Alors, vous regardez mes lectures ?
Un long voyage de Claire Duvivier
Issu d’une famille de pêcheurs, Liesse doit quitter son village natal à la mort de son père. Fruste mais malin, il parvient à faire son chemin dans le comptoir commercial où il a été placé. Au point d’être pris comme secrétaire par Malvine Zélina de Félarasie, ambassadrice impériale dans l’Archipel, aristocrate promise aux plus grandes destinées politiques. Dans le sillage de la jeune femme, Liesse va s’embarquer pour un grand voyage loin de ses îles et devenir, au fil des ans, le témoin privilégié de la fin d’un Empire.
J’ai beaucoup aimé ce roman. J’ai trouvé la plume très agréable, emphatique dans un premier temps mais qui s’adoucit petit à petit pour devenir plus terre à terre. Le récit est raconté du point de vue de Liesse, qui découvre d’autres contrées lointaines. On pense tout d’abord avoir affaire à une fantasy où les éléments magiques sont peu présents, mais en réalité on découvre que des personnes sont restées coincées dans des temps anciens. Ces dernières posent la question de la pérennité des coutumes et des idées dans un monde qui est en transformation.
Le silence de la ville blanche d’Eva Garcia Saenz de Urturi
Dans la cathédrale de Sainte-Marie à Vitoria, un homme et une femme d’une vingtaine d’années sont retrouvés assassinés, dans une scénographie macabre : ils sont nus et se tiennent la joue dans un geste amoureux alors que les deux victimes ne se connaissaient pas.
Détail encore plus terrifiant : l’autopsie montrera que leur mort a été provoquée par des abeilles mises dans leur bouche. L’ensemble laisse croire qu’il existe un lien avec une série de crimes qui terrorisaient la ville vingt ans auparavant. Sauf que l’auteur de ces actes, jadis membre apprécié de la communauté de Vitoria, est toujours derrière les barreaux. Sa libération conditionnelle étant imminente, qui est le responsable de ces nouveaux meurtres et quel est vraiment son but ?
Une certitude, l’inspecteur Unai López de Ayala, surnommé Kraken, va découvrir au cours de cette enquête un tout autre visage de la ville.
Haletant, complexe et bien pensé, Le silence de la ville blanche ravira les fans de policier sombres avec des intrigues ésotériques alambiquées. Sa force est de savoir maîtriser les de ce type d’œuvre avec assez de subtilité pour ne pas créer de sensation de déjà vu. C’est notamment réussi grâce à l’implantation d’éléments historiques et culturels du Pays Basque espagnol, qui sont vraiment le centre de l’enquête. Les personnages sont variés et globalement attachants, bénéficiant d’une histoire toujours sombre mais qui apporte de la solidité dans leur construction. J’ai cependant des réserves sur certains clichés autour de leurs relations (romance un peu accessoire, gémellité peu creusée…), mais ce n’est pas assez pour ternir ce qui est, globalement, un excellent roman policier.
Chesstomb de John Ethan Py
« Son corps meurtri et griffé avait pris une teinte bleuâtre se confondant avec celle du sapin, si bien que ceux qui le trouvèrent crurent un instant à une statue végétale surgie de l’arbre lui-même. »
1922. Howard Phillips Lovecraft écrit une de ses plus étranges nouvelles : Herbert West, réanimateur.
2001. Le meurtre atroce d’une famille plonge la ville de Chesstomb dans le deuil. Journaliste de renom, Shelby Williams vient y enquêter. Accumulant une somme de documents qui fera date dans l’histoire du journalisme d’investigation, il remonte peu à peu l’histoire de la ville. Jusqu’à cette fameuse année 1922 qui a vu la querelle de plusieurs médecins tourner au tragique. Le plus étrange : tout indique que le personnage de Lovecraft aurait son origine dans ce drame.
Chesstomb crée avant tout la surprise grâce à un format original. Se basant sur des éléments comme des extraits de journaux ou des témoignages, le livre dégage rapidement une ambiance étrange. On a l’impression de participer à une chasse au trésor complexe, trop parfois devant la multitude de personnages. Le livre jongle habilement avec les genres, à part quelques scènes gores ou de sexe qui frisent le kitsch. J’ai cependant apprécié les références philosophiques et littéraires qui sont bien imbriquées à l’histoire du roman, notamment autour de Descartes et de HP. Lovecraft. Cerise sur le gâteau, j’ai trouvé le final très réussi.
Délius, une chanson d’été de Sabrina Calvo
XIX e siècle. Bertrand Lacejambe est un célèbre botaniste dont la particularité est de manger des fleurs, une bizarrerie culinaire qui lui vaut de de changer de couleur de cheveux au rythme de ses humeurs. Accompagné de son fidèle ami Fenby, elficologue amateur, il va braver les dangers pour démasquer un tueur dont le rituel consiste à tapisser le ventre des cadavres avec des fleurs au parfum entêtant.Sur leur route, ils sont entraînés dans une bien curieuse mélodie, faite de fleurs inconnues, de thé vénéneux, d’enfants rêveurs, de forêts hantées, de lucioles, de cauchemars et de rires.Une fantasy victorienne étourdissante pleine d’humour et de poésie et une enquête délirante, sur un ton souvent décalé.
J’ai du mal à dire si j’ai aimé ce roman ou si j’ai eu du mal à accrocher. Un peu des deux j’imagine. Je trouve la plume très belle, poétique et très immersive, avec une vraie recherche et une vraie singularité. Les personnages sont délicieusement excentriques, ce qui donne naissance à des scènes cocasses et des échanges qui ne manquent pas de piment. Cependant, à trop vouloir donner cette atmosphère énigmatique, j’ai trouvé que le tout manquait de cohérence, de liant. Les scènes s’enchaînent sans qu’il semble qu’il y ait de cause à effet, avec des symboles cryptiques qui laisseront les plus cartésiens d’entre vous sur le carreau.
Rouge de Pascaline Nolot
Accroché au versant du mont Gris et cerné par Bois Sombre se trouve Malombre, hameau battu par les vents et la complainte des loups. C’est là que survit Rouge, rejetée à cause d’une particularité physique. Rares sont ceux qui, comme le père François, éprouvent de la compassion à son égard. Car on raconte qu’il ne faut en aucun cas toucher la jeune fille sous peine de finir comme elle : marqué par le Mal. Lorsque survient son premier sang, les villageois sont soulagés de la voir partir, conformément au pacte maudit qui pèse sur eux. Comme tant d’autres jeunes filles de Malombre avant elle, celle que tous surnomment la Cramoisie doit s’engager dans les bois afin d’y rejoindre l’inquiétante Grand-Mère. Est-ce son salut ou bien un sort pire que la mort qui attend Rouge ? Nul ne s’en préoccupe et nul ne le sait, car aucune bannie n’est jamais revenue…
Bien écrit, ce conte macabre joliment réinterprété est une très bonne surprise ! L’autrice propose une histoire sombre pour mettre en exergue la violence faite aux femmes, la superstition, les foules aveugles et le danger des apparences. Sans concession, la plume nous emmène à la suite d’une héroïne qui connaîtra bien des déboires et devra surmonter bien des dangers. Le récit reprend les codes du conte originel du chaperon rouge pour en proposer une version à la fois cruelle et moderne. La lecture est parfaite pour la période d’Halloween.
Scavenge the Stars de Tara Sim
Lorsqu’Amaya sauve un mystérieux étranger de la noyade, elle craint que ses actions irréfléchies ne lui valent une plus longue peine sur le bateau de débiteurs où elle est retenue captive depuis des années. Au lieu de cela, l’homme qu’elle a sauvé lui offre des richesses inimaginables et une nouvelle identité, entraînant Amaya dans une course périlleuse à travers la ville-État côtière de Moray, où l’opulence du vieux monde et les joueurs désespérés se heurtent. Amaya ne veut qu’une chose : se venger de l’homme qui a ruiné sa famille et volé la vie qu’elle avait autrefois. Mais plus elle s’empêtre dans ce jeu de dupes – et plus son chemin s’entremêle avec le fils de l’homme qu’elle cherche à faire tomber – plus elle découvre la vérité sur son passé. Et plus elle réalise qu’elle ne doit faire confiance à personne…
Je n’ai malheureusement pas accroché à ce roman ! Le premier problème est qu’il se vend comme une réinterprétation du Comte de Monte Cristo d’Alexandre Dumas, et qu’il s’agit d’un livre que j’adore. Dès lors, se mesurer à un classique aussi complexe est une épreuve en soi. Scavenge the stars avait pourtant du potentiel en replaçant le contexte dans une ambiance plus orientale avec un personnage principal féminin. Cependant, les personnages demeurent fades et peu attachants et n’ont pas énormément d’évolution, notamment les principaux. Le world building est très superficiel, avec beaucoup d’éléments peu creusés : une histoire de fièvre, des Empires dont on ne sait finalement que de choses… Enfin, l’histoire en elle-même n’est pas assez approfondie pour avoir une véritable portée dramatique, dans le sens où Amaya ne se venge pas de personnes qu’elle connaît personnellement, et que les antagonistes n’ont pas d’épaisseur et se contentent d’être très négatifs, rendant l’histoire assez simpliste.
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1 commentaire
Shaya · 4 décembre 2021 à 16 h 44 min
En majorité de belles lectures donc ! Je crois que pour moi c’est After d’Auriane Velten 🙂