Quand j’ai montré ce roman lors de la traditionnelle présentation de mes derniers achats, quelques membres de ma communauté férue de SF, ils se reconnaitront, étaient extatiques. Il est vrai que je n’avais pas eu l’occasion de lire ce pilier de la science-fiction à l’ancienne, capable de déployer des mondes originaux et pionnier de l’introduction du seske dans notre genre de l’imaginaire choyé. Je me suis donc lancée dans La nuit de la lumière, roman acheté en seconde main.

Ce roman entre dans le Summer Star Wars Challenge de Lhisbei.

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Synopsis de La nuit de la lumière

Sur la planète de la Joie de Dante, tout peut arriver pendant la Nuit de la Lumière qui dure sept jours tous les sept ans.
Si le dieu meurt, Sept Pères engen­drent un autre dieu, celui du bien ou celui du mal, qui naît de la déesse Boonta, la Mère, la Créatrice. Pour les habitants de la Joie de Dante, c’est la purification, la mort ou la métamorphose… Tous les souhaits sont exaucés mais comment savoir quels désirs monstrueux sont tapis dans le subconscient de chacun ? Bien peu osent tenter la Chance et passer la Nuit. La majorité choisit le Sommeil…
John Carmody, truand, voleur, assassin, tortionnaire, est le premier Terrien à être assez hardi pour braver la période magique. Il en résultera des bouleversements qui seront ressentis dans l’univers entier, jusque sur la planète Terre à 50 millions d’années-lumière…

Un roman tout en oxymore

Le charme des années 60-70 et bien plus

José Philip Palmer nous entraîne sur une planète lointaine au nom évocateur, La joie de Dante, aux basques du peu recommandable John Carmody. Ce dernier fait partie des groupes de chasseurs de primes, assassins et autres membres de la lie spatiale. Recruté par une église terrienne, il dit enquêter sur le phénomène de la Nuit et le culte païen du Boontaïsme. Pendant la nuit, les habitants éveillés se purifient alors que leurs rêves, leurs cauchemars, leurs désirs, deviennent réalité. Un paradis ? Loin de là, car qui sait ce qui dort dans les tréfonds des esprits ? Peu de ceux qui tentent la nuit parviennent à survivre, c’est un temps sans règle et sans limite. Autant dire que c’est un terreau fertile pour l’auteur. Philip José Farmer écrit des passages oniriques, entre violences et fantasmes. Le longue nuit est un passage très marquant de ce court roman, car l’auteur joue avec la morale en nous plongeant dans l’esprit délirant d’un être abject.

Le livre semble dans un premier temps osciller entre les questions du bien et du mal. La Nuit, la déesse créatrice Boonta donne naissance à l’un de ses deux fils, Dieu du mal ou du Dieu du bien, selon l’inclination des croyants sur la planète. Le personnage de John Carmody est lui-même assez simple, il est rapidement décrit comme un homme violent, possessif et brutal. Pourtant la nuit va révéler la réalité de ce dont il est fait. Une Nuit Symbolique car, au lieu de prendre la vie, il va avoir l’occasion de la donner. Créature de chair, créature de son esprit, cet être métissé va profondément changer le destin de la galaxie. Tout comme John Carmody ressortira purifié de la Nuit, comme beaucoup d’individus ayant été capables de survivre à ce moment clé.

Passé tenace et prosélytisme

La deuxième partie propose une coupure surprenante de plusieurs années. Ce passage de temps permet de mettre en avant les particularités du Boontaïsme. Comment les religions traditionnelles peuvent-elles concurrencer une croyance qui s’incarne réellement dans la chair et donne vie à des miracles aussi terrifiants que majestueux ? Repentie, John Carmody doit faire son retour sur la Joie de Dante. Sa conversion dans la chrétienté le rend particulièrement sensible aux questionnements existentiels liés à la religion. Toutes les croyances craignent une expansion du Boontaïsme, elles observent déjà des conversions massives de leurs fidèles qui se dirigent alors vers la Joie de Dante. La question est ainsi de savoir si la foi et les promesses peuvent suffire à maintenir les croyants dans leur piété ? Outre ces questions tenaces, le Père Carmody découvre que son passé de meurtrier n’a pas disparu. Cet état de fait maintient une tension et permet de souligner le caractère fortement ambigu du personnage principal.

J’ai ainsi été heureusement surprise de ces choix narratifs, qui donnent à La nuit de la Lumière une aura vraiment originale. Le roman conserve les défauts typiques de la SF de l’époque. Nous avons par exemple peu de personnages féminins qui jouent un rôle proéminent, nous restons plutôt dans le personnage fonction qui sert de motivation pour le héros. Ensuite, c’est une science-fiction très éloignée des aspects scientifiques. Beaucoup d’éléments se rapprochent d’une forme de fantasy, ce qui n’est guère gênant pour moi, mais peut désarçonner des lecteurs férus de Hard SF. Ceci dit, j’ai trouvé que ces failles étaient contrebalancés par la créativité de l’auteur, son audace dans les questionnements moraux et la construction psychologique bien menée de son héros.

La porte de la lumière, fenêtre sur un monde en clair-obscur

Quel étrange roman ! Philip José Farmer propose une histoire réellement unique. En mettant en scène un homme peu recommandable sur un monde où les rêves et cauchemars prennent vie, il donne vie à des dilemmes spirituels et moraux. Avec un style corrosif, il n’hésite pas à pousser les limites de la bienséance lors de la Nuit, un événement religieux sacré capable de détruire comme de purifier ceux qui y survivent. Cette expérience véritablement transcendantale permet de complexifier le personnage de John Carmody, faisant de lui le parfait réceptacle des craintes et questionnements des religions plus installées dans la galaxie. Outre ce côté très original, le côté magique de certaines scènes comme la superficialité (et la quasi inexistence) de personnages féminins peuvent déplaire.

Note : 16/20

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Catégories : Chroniques

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