Li-Cam est une autrice que j’avais découverte avec son roman Résolution. Je poursuis mon immersion dans ses oeuvres avec Cyberland, un roman qui attisait ma curiosité depuis déjà plusieurs années. Car elle a un point de vue singulier sur la technologie et l’individualité qui montre une grande sensibilité doublée d’un sens de l’analyse passionnant.
Synopsis de Cyberland
Ici le destin se décide œil pour œil, dent pour dent. Tu ne te copieras point en dehors des Terres Parallèles. Tu ne convoiteras pas le fichier d’autrui. Tu ne formateras pas hormis pour sauver le système.
Dans un monde post-singularité
Dictature et monde virtuel
Le roman de Li-Cam nous place dans un monde où une intelligence artificielle a atteint la singularité, c’est-à-dire qu’elle est devenue autonome. Evidemment, la méfiance à l’idée qu’un être artificiel puisse prendre des décisions en toute autonomie s’installe rapidement. Nous comprenons que le régime sévère, le Dicktrans, tente de détruire cette Intelligence que son propre terrain, l’Infosphère. vaste monde virtuel dont les seules limites sont quelques règles immuables, l’Infosphère abrite les humods, des humains améliorés rebelles contre le régime. Vous l’aurez compris, Li-Cam construit un monde complexe dans lequel elle nous plonge sans préambule, avec un groupe d’adolescents désignés pour mener une mission dangreuse mais dans laquelle de nombreux adultes ont déjà échoué.
Le roman surprend car nous sommes dans une sorte d' »Alice au pays des merveilles » en version cyberpunk. Le monde construit par l’Intelligence Artificielle semble au premier coup d’oeil délirant. Tous les fantasmes loins de la réalité sont permis, que ce soit dans les apparences ou les expériences menées par les utilisateurs. Vous pouvez manger ce que vous voulez, expérimenter ce que vous voulez, ressembler à un serpent géant à tête humaine si vous le souhaitez. Mais certains personnages s’en rendrons bien vite compte : Cyberland obéit en réalité à une logique bien rodée liée à des programmes. La logique derrière ce qui semble être la folie la plus pure. Le récit est ainsi très différent de ce à quoi je m’attendais.
La quête de soi et la quête de la vérité
Le récit de la première partie se pose comme une quête identitaire. Le choix d’adolescents comme personnages principaux trouve tout son sens. Ce sont des individus en construction, avec l’esprit toujours assez souple pour faire face à des changements brutaux, mais aussi capables de comprendre les logiques subtiles qui se cachent dans le Cyberland. Les personnages sont ainsi bien construits et variés. J’ai apprécié voyager à leurs côtés dans les différentes parties du monde virtuel. Mais ce que j’ai le plus apprécié, c’est le narrateur, un programme appelé le Hiérophante, à savoir « celui qui interprête le sacré ». Une grande partie du roman consiste, pour le lecteur comme le personnage, à traduire les signes pour traverser les épreuves. Le momentum a lieu dans une sorte de jeu de rôle dans lequel les protagonistes doivent sauver d’autres personnes pour accomplir leur mission.
J’ai beaucoup cet aspect chasse au trésor, qui permet en plus d’explorer la psyché de nos héros. Ce qui est parfois plus difficile, c’est qu’il faut accepter de ne pas tout comprendre d’un coup. Parfois, la plume de l’autrice peut se faire bavarde. C’est notamment le cas de la nouvelle Asulon. Brillant dans son déroulé et ses réflexion, ce réfit qui fait suite au premier se focalise sur la place de l’IA face à l’Humanité, mais aussi la notion de résistance face aux pouvoirs contrôlants. La longue nouvelle de nombreux aspects philosophiques passionnants et pointus qui ne plairont pas à tout le monde, mais qui montrent une connaissance approfondie des enjeux de l’IA et se montrent particulièrement judiceux dans le contexte actuel.
Cyberland, un récit visionnaire et poussé
Plongée dans un monde virtuel géré par une Intelligence Artificielle ayant atteint la Singularité. Le récit de Li-Cam est un Alice au pays des merveilles au goût cyberpunk. Un groupe d’adolescents se découvrent en explorant un univers sans limites, posant la question de la place de l’Individu face à une créature artificielle. Le court roman se construit en symboles et en signes, suivant une logique propre, parfois alambiquée, qui perdra certains lecteurs. D’autant plus que l’autrice n’hésite pas exploiter des références anthrolopgiques et philosophiques pointues pour donner du corps à son récit. Une démarche particulièrement pertinente dans le contexte actuel.
Note 16/20
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