L’art de la joie, un roman qui avait éveillé mon intérêt dès l’instant où j’avais appris son existence. De par son statut, chef-d’oeuvre de la littérature féministe italienne, publié de manière posthume car trop sulfureux. De par son titre, la femme qui figure en noir en blanc sur la photo, Goliarda Sapienza, dont le nom aux sonorités lointaines évoquent l’inconnu. Me voilà au bout de ses quelques 900 pages. Qu’en ai-je pensé ?

Synopsis de l’art de la joie

L’Art de la joie est principalement le roman d’une vie, celle de Modesta, personnage magnifique né le 1er janvier 1900 sur les pentes de l’Etna, en Sicile. Du chaos misérable de son enfance aux hasards de la vie qui feront d’elle l’héritière insoumise d’une famille dégénérée de nobles siciliens, c’est en fait à un apprentissage de la liberté que cette oeuvre nous invite.

Un roman dense et puissant

Une plume unique et évocatrice

Le style ! Le style de L’art de la joie est l’un des plus immersifs qu’il m’ait été donné de lire. Goliarda Sapienza a une façon unique d’associer les mots, de jouer avec les rythmes, qui ensorcelle le lecteur. Son écriture est organique et sensorielle. Elle fait appel à tous les sens de son public, et bien plus qu’être simples spectateurs, nous devenons complètement Modesta. 

Cette empathie qu’elle crée avec son personnage, elle sert complètement à bâtir la complexité de Modesta. D’autant plus que l’autrice choisit de varier les formes d’écriture pour démontrer le caractère pluriel de cette femme. La troisième personne du singulier va céder sa place à la première personne, notamment dans les moments de forte émotion. Le récit va se transformer en pièce de théâtre, notamment lorsque les personnages sont nombreux. Non seulement les échanges vont devenir plus clairs, mais en même temps chacun, dont Modesta, va devenir acteur en représentation dans le jeu social et jouer un rôle face aux autres.

Une intrigue portée par la singularité de son personnage central

Cette Modesta, encore et toujours, est un personnage très ambivalent. Paradoxale, je suis à la fois admirative de sa personnalité forte, franche et déterminée. de sa soif infinie de vivre. Mais j’étais parfois jalouse de cette force dont elle faisait preuve, de ce rayonnement qu’elle avait, comme si son charme avait quelque chose de surnaturel. Modesta est comme la vie elle-même, elle échappe à toute forme de manichéisme pour être unique et inclassable. Elle évolue constamment constamment à travers les étapes de sa vie de femme, adolescente, jeune, mère, grand-mère… Un portrait grandiose.

L’art de la Joie a été publié de manière posthume, bien après que Goliarda Sapienza a fini l’oeuvre. On comprend pourquoi. Le roman met en exergue une façon de pensée résolument moderne. Modesta est une femme qui tend constamment vers l’affirmation d’elle-même, et fait fi des carcans imposés par la société rigide et codifiée de son époque. Elle fascine autant qu’elle révulse. Elle est à la fois libre politiquement, intellectuellement et sexuellement. Et ses trois points la font sortir du conformisme social pour l’élever en être qui assume ses propres désirs. Et ce n’est pas quelque chose qui est facilement accepté.

Autre point intéressant, ce personnage existe tel qu’il est grâce à son aisance financière et une forme de mariage. Car dans la société, surtout celles où le rôle de la femme est très traditionnelle comme la Sicile de la première moitié du XIXe siècle, ce sont des profiles de femmes atypiques qui s’affranchissent de la tutelle des hommes. Les veuves, en particulier. 

Un roman qui laisse des traces

L’art de la joie est le genre de roman que l’on referme sans savoir si on l’a apprécié. Le livre est dense, riche, bardé de nuances complexes. Le manichéisme n’a pas sa place, à l’image de la vie. C’est en revanche le genre de roman que l’on referme en sachant que, par on ne sait quel miracle de l’écriture, il nous a changé. 

Note : 18/20

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Catégories : Chroniques

2 commentaires

Babitty Lapina · 19 mars 2019 à 21 h 15 min

J’avais vaguement entendu parler de ce roman, mais c’est la première fois que je tombe sur une chronique ! Tu m’as vraiment envie de lire ce roman. Je le met direct dans ma PAL ♥ Merci pour la découverte !

    La Geekosophe · 20 mars 2019 à 14 h 12 min

    J’en avais très peu entendu parler jusqu’ici ! Quel dommage, c’est vraiment une belle oeuvre 🙂

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