J’ai trouvé ce livre de Xinran en librairie. J’avais beaucoup entendu parler de ses recueils de témoignages de femmes chinoises, qui aidaient à mieux comprendre une partie méconnue de ce pays qui alimente bien des fantasmes. Le sujet de l’enfant unique me semblait essentiel : est-ce que ces générations de jeunes chinois élevés seuls allaient avoir un impact ?
Synopsis de L’enfant unique
« Ceci est un livre sur la première génération d’enfants uniques en Chine, ceux nés entre 1979 et 1984. Ils ont profité seuls de tous les cadeaux matériels, de l’amour et de l’attention qu’ils auraient dû partager avec une fratrie. Pour cette raison, ils ont manqué de pratique dans tout ce qui touche à la communication, au partage, à l’entraide, à la tolérance. C’était comme si le monde n’appartenait qu’à eux. En même temps, quand je regarde leurs croyances, leurs valeurs, leurs techniques de survie, les mots même qu’ils utilisent, je m’étonne de voir à quel point ils sont différents les uns des autres. Je crois qu’arrivés à la fin de ce livre, vous aurez peut-être, comme moi, été émus par chacun d’eux.
Et vous vous apercevrez aussi que leur histoire retrace le cours des transformations rapides qui se sont produites dans la société chinoise. Comprendre les enfants uniques d’aujourd’hui en Chine constitue une ressource inestimable pour comprendre non seulement l’avenir de la Chine, mais aussi sa manière d’interagir avec le reste du monde. Pourquoi devrions-nous écouter et essayer de comprendre la voix de cette génération ? Parce que l’avenir que nous partageons avec eux est aussi précieux que le ciel bleu. »
Une série de témoignages touchants
Des enfants « uniques »
J’ai globalement apprécié ces récits de vie. Le livre est séparé en différents témoignages recueillis par Xinran. Elle leur pose beaucoup de questions autour de la façon dont ils considèrent la famille ou la culture chinoise. On a donc un regard assez profond sur les relations complexes qui se tissent entre la générations des Soleils et le reste d’un monde où ils ont élevés pour en être le centre.
Il y a donc certains éléments qui ne surprennent et sont même assez cocasses ou désespérants. Beaucoup, lorsqu’ils quittent le nid familial, sont incapables de mener une vie autonome. Ils ne savent pas cuisiner, commander dans un restaurant, s’occuper de leurs affaires… Ils ont été tellement couvés que même les tâches les plus simples leur sont impossibles. Comme ils sont la seule descendance de leur famille, beaucoup n’avaient pas le droit d’entrer dans la cuisine, leur parents craignant qu’ils se blessent avec les couteaux.
Des témoignages parfois surprenants
Ils sont également souvent gâtés par leur famille. L’ensemble de leur train de vie est souvent couvert et ils n’ont à penser à rien. Il y a un cas où des parents ont acheté un appartement à leur fils qui venait de se marier. Les parents et beaux-parents viennent chaque jour cuisiner ou leur le ménage. Xinran a même constaté que lorsque la première génération d’enfants uniques commençaient à avoir leurs propres enfants, ces derniers les délaissaient, incapables de s’en occuper.
Mais si ces parties sont attendues, ce sont surtout les sentiments des enfants uniques qui sont intéressants. Ils ont conscience ou prennent assez vite conscience qu’ils sont gâtés et incapables. L’une des jeunes femmes est dans le livre remarquablement véhémente. Elle en veut à ses parents de l’avoir traitée comme un animal de compagnie, de l’avoir rendu incapable de vivre par elle-même et dépendante. Elle refuse donc de leur parler pendant de longues années. Mais loin d’être un cas isolé, beaucoup d’enfants finissent par haïr leurs propres parents.
Dommage que certains grains de sable se glissent dans les rouages
Il y a cependant quelques petites choses qui m’ont gênées dans ce recueil. Beaucoup des personnes interrogées avaient des profils très similaires. Elles souvent issues de familles privilégiées, parfois même issues de la très haute bourgeoisie de la Chine, ayant grandi en milieu urbain, à l’exception de deux témoignages peut-être. Xinran les a toute rencontrées ou connues alors qu’elles faisaient leurs études hors de la Chine. Du coup, je me pose la question de la représentativité du panel de l’autrice, d’autant plus que 70% de la population chinoise vit en zone rurale.
Ensuite, j’ai souvent trouvé que Xinran avait tendance à beaucoup intervenir dans ses entretiens. Parfois, c’est nécessaire et intéressant, mais d’autres fois j’ai eu l’impression qu’elle tentait de faire passer ses idées aux jeunes personnes qu’elle rencontrait. Je me suis parfois demandée jusqu’à quel point certaines réflexions étaient originaires des interrogés ou de certaines paroles de Xinran.
L’enfant unique : des témoignages édifiants pour en savoir plus sur la Chine moderne
Mais il reste un livre très enrichissant pour tous ceux qui s’intéressent à la culture chinoise ou à la sociologie. Les témoignages se centrent sur une cohorte unique en son genre qui fait entendre la voix de ces enfants uniques. Même si les témoignages se répètent ou que la journaliste prend un peu trop de place par moments, c’est un coup d’oeil acéré au sein d’une société qui évolue à grande vitesse.
Note : 15/20
Vous pouvez acheter le livre par ici. Toutes les chroniques sont par là.
2 commentaires
Babitty Lapina · 25 août 2019 à 15 h 20 min
Ce livre me fait terriblement envie ! De la même autrice, j’ai lu Chinoises. Mais peut-être l’as-tu lu… Si ce n’est pas le cas, on reprend le même principe, des témoignages de femmes diverses. Cette fois-ci les profils sont plus divers je trouve. Et ces femmes parlent donc d’elles-même, de leur place de femme dans la société chinoise. C’est très dur, touchant et m’a mis pas mal en colère. Mais je te le recommande si tu ne l’as pas lu !
La Geekosophe · 25 août 2019 à 21 h 19 min
C’était mon premier de Xinran ! J’aimerais me lander dans messages de mères inconnues ou dans Chinoises quand j’aurais un peu de temps 😉