Underground Airlines avait attiré mon attention grâce à son postulat osé et puissant. Puis il a reçu quelques prix, et pas des moindres. Alors quand ActuSF me l’a proposé en service presse, j’ai sauté sur l’occasion. J’ai bien fait, car il s’agit d’une pépite de la dystopie et de l’uchronie.

Synopsis d’Underground Airlines

Amérique. De nos jours. Ou presque.

Ils sont quatre. Quatre États du Sud des États-Unis à ne pas avoir aboli l’esclavage et à vivre sur l’exploitation abjecte de la détresse humaine. Mais au Nord, l’Underground Airlines permet aux esclaves évadés de rejoindre le Canada. Du moins s’ils parviennent à échapper aux chasseurs d’âmes, comme Victor. Ancien esclave contraint de travailler pour les U.S. Marshals, il va de ville en ville, pour traquer ses frères et sœurs en fuite. Le cas de Jackdaw n’était qu’une affaire de plus… mais elle va mettre au jour un terrible secret que le gouvernement tente à tout prix de protéger

Un lecture de très bonne qualité

Courageux dans son choix de contexte

L’une des premières qualités du roman est sa capacité à nous plonger dans un monde terrifiant. L’écriture de Ben H. Winters nous plonge immédiatement dans un univers violent. Sa plume est directe et sèche, s’accorde peu de fioritures hormis pour souligner les moments où notre personnage principal baratine en empruntant une autre identité. L’auteur ne lésine pas sur les insultes et les moments de pur malaise tant le racisme suinte au Nord comme au Sud.

Il y a quelques détails particulièrement finement pensés. En dehors des quatre Etats esclavagistes, il existe par exemple des marques de cigarettes avec un label qui garantissent leur production hors esclavage. C’est un peu cynique et tellement réaliste tant la proximité avec les labels équitables est visible. L’autorisation de l’esclavage amène à de nouveaux modes d’organisation du travail, avec ses rites, ses règles, mais aussi ses espaces consacrés qui montrent un paradoxe criant entre une société qui perpétue un racisme institutionnel mais en le maquillant d’une humanité paternaliste qui dégouline d’hypocrisie.

Underground Airlines pose des éléments maîtrisés et bien équilibrés

Outre le contexte, l’histoire est en elle-même captivante. L’auteur prend le parti de l’ambiguïté en mettant en avant un ancien esclave qui capture les fuyards qui tentent de rejoindre le Canada. Dès lors, on comprend que l’on sera baigné dans une moralité grise, où personne ne peut vraiment être un héros, où les combattants de la liberté ne sont pas toujours les plus reluisants et les esclavagistes ont aussi une famille et des rêves.

Le centre de l’histoire est dans un premier temps une chasse et une enquête classiques à première vue. Mais on découvre avec Victor qu’il y a plus de profondeur : les rebondissements sont nombreux et maîtrisés. Le scénario est à l’image de l’univers, complexe et doux-amer. Certains moments sont violents, physiquement comme psychologiquement, mais ce n’est jamais dans la gratuité.

Les personnages sont également très bien campés. Victor brille par sa psychologie fine. On est dans sa tête l’ensemble du récit, observant ses doutes, constatant son évolution. Mais les autres protagonistes sont parfaits. Martha, la jeune femme faussement insouciante, amoureuse d’un esclave. Même ceux dont on a juste quelques lignes de description sont parfaitement croqués et on se les imagine très nettement.

Enfin de la dystopie originale et fortement addictive

En conclusion, c’est un bon cru. Je commençais à désespérer de trouver des dystopies qui soient originales. Underground Airlines parvient à échapper aux tropes les plus répétitifs du sous-genre pour proposer une histoire avec une critique acérée des problématiques raciales aux Etats-Unis mais aussi sur la fragilité de l’histoire et de la tolérance. Monde immersif et bien pensé, personnages bien construits et scénario mené de main de maître, c’est un récit marquant que je vous conseille !

Note : 17/20

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Catégories : Chroniques

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