Une excursion de plus dans l’œuvre exquise d’Ursula Le Guin. Le monde de Rocannon fait partie du Cycle de Hain et de la ligue de tous les mondes. Le roman surprend, car il s’agit d’une oeuvre de science-fantasy qui mêle les deux genres de manière étonnante.

Ce récit entre dans le défi du Summer Star Wars :

Synopsis du monde de Rocannon

Cette planète sans nom du système stellaire de Fomalhaut est l’enjeu d’un conflit entre la Ligue de tous les mondes et un Ennemi inconnu. Cinq espèces intelligentes se la partagent. Aucune n’a dépassé le niveau féodal. Certaines communiquent par la pensée. Rocannon, ethnologue, y est envoyé par la Ligue afin d’observer les peuples qui l’habitent avant l’arrivée d’une mission technologique qui assurera le développement de la société la mieux placée.Mais l’Ennemi surgit de l’espace avant que le plan ne soit accompli.Avec une poignée de compagnons, Rocannon, devenu Olhor l’Errant, le Seigneur des étoiles, va entreprendre de chasser les envahisseurs.

Une expérience de lecture surprenante

On retrouve les marqueurs de l’autrice

Nous ne sommes pas perdus ! Le personnage principal est un ethnologue d’une quarantaine d’années qui étudie une nouvelle planète. Cette dernière, peuplée exceptionnellement de différentes races bien distinctes, pourrait rejoindre le bras armé dans une guerre intersidérale contre des ennemis voraces. Évidemment, une situation très abstraite pour des êtres dont l’évolution en est encore au stade féodal et qui ne connaissent pas le voyage spatial. Rocannon, notre larron, est donc un analyste charger de catégoriser et étudier les natifs de la planète sans nom.

C’est l’occasion pour Ursula Le Guin de développer sa passion pour l’anthropologie. On y voit ainsi les tensions culturelles qui animent les différentes cultures entre elles. L’importance de la place des légendes dans la construction d’un référentiel commun afin de créer une société soudée. Les différents modes de vie, avec leurs hiérarchies, leurs habitations. Mais aussi comment la science est perçue par des sociétés locales comme une forme de magie, ou comme les autochtones considèrent un monde qui pour est, sans avoir de nom ou de place dans un canevas plus vaste qu’ils peinent à appréhender. Certains passages évoquent même les biais de Rocannon, lorsqu’il prend des créatures inconnues pour des êtres intelligents juste parce qu’elles sont très humanoïdes et ressemblent à des anges.

Un cocktail déstabilisant

J’ai rarement lu une œuvre qui mêlait autant science-fiction et fantasy avec autant d’audace. Nous sommes bien dans un space opéra avec ses choix narratifs habituels : l’observation de la vie locale à l’échelle d’une planète, ici par un humain issu d’un autre monde. Nous avons des vaisseaux spatiaux, des moyens de communication, une combinaison protectrice qui résiste au feu et à la plupart des éléments destructeurs. Mais le tout se mêle à des parties issues typiquement de la fantasy, des parties qui semblent même issues des topoi les plus communément rencontrés du genre.

Rocannon doit ainsi réaliser une quête aux côtés de compagnons aux talents variés. Au cours de son voyage, il devient le centre d’une prophétie de l’une des prophétie des peuples natifs sous le nom mythique d’Olhor l’errant. Il gagne la capacité d’empathie, de ressentir les émotions des autres. En outre, l’idée que plusieurs très différentes cohabitent dans un univers très médiéval est évidemment fantasy à son paroxysme. L’ensemble donne un sentiment ambivalent d’originalité mais aussi d’aspects très clichés, qui peut plaire comme déplaire, mais qui aurait mériter plus de pages pour être exploré. En tout cas, la maîtrise des codes des deux genres est à saluer et impressionne, d’autant plus qu’il s’agit d’un premier roman !

Une longueur un peu bâtarde sauvée par un style lyrique

Le roman est en effet assez court, moins de 200 pages. Pourtant, l’autrice parvient à faire passer une quantité d’informations impressionnantes sur son univers. Le rythme est assez soutenu ceci-dit, ce qui fait qu’on s’ennuie assez peu. Cependant, j’ai parfois l’impression de voir un condensé de beaucoup d’informations et d’événements qui s’enchaînaient très rapidement, ce qui a pu nuire à ma compréhension de certains éléments du déroulé narratif. Sans doute avais-je besoin de passages un peu plus contemplatifs pour avoir le temps de digérer ce qui m’était partagé ?

Mais heureusement, Ursula Le Guin insuffle dans Le monde de Rocannon son style si particulier. Entre lyrisme et poésie, elle est capable de donner en quelques mots un sens profond aux pensées et actions des personnages, de donner corps à un monde crédible malgré son caractère profondément hétéroclite et disparate. Sans compter qu’elle le fait une fluidité, comme si nous glissions à travers les pages ! Elle nous donne un aperçu de la magicienne des mots qu’elle est appelée à devenir.

Le monde de Rocannon est un joli roman, à la croisée des genres

La façon dont est construit Le monde de Rocannon est très originale ! Il mêle des éléments des deux genres, avec un monde qui comporte plusieurs races, une quête, un conglomérat interplanétaire avec un certain talent. L’écriture est une fois de plus très poétique et les personnages sont bien construits et intéressants. Le livre est cependant un peu court, ce qui empêche certains éléments d’être plus approfondis et donne une sensation de trop peu. Une lecture rapide et sympathique, mais qui reste une belle œuvre pour un premier roman !

Note : 15/20

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Catégories : Chroniques

2 commentaires

Vert · 6 septembre 2020 à 18 h 43 min

C’est loin d’être le meilleur du cycle mais j’ai une certaine affection pour son prologue (qui était une nouvelle à l’origine) et pour son ambiance science-fantasy très réussie avec ses hippogriffes ^^

    La Geekosophe · 10 septembre 2020 à 8 h 58 min

    Ce n’est certes pas le meilleur, mais c’est aussi un premier roman et l’écriture est déjà sublime

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