Les classiques sont ennuyeux ? C’est une idée commune, mais surtout une idée reçue ! Il y a une grande variété parmi les classiques de la littérature française (et francophone), et certains ont marqué ma vie de lectrice plus que d’autres. Je vous propose de découvrir ceux que je considère comme mes favoris, même parmi ceux que j’ai lus il y a des années et des années.

Les liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos

Les liaisons dangereuses de Laclos

Au petit jeu du libertinage, l’adorable Valmont et la délicieuse Madame de Merteuil se livrent à une compétition amicale et néanmoins acharnée : c’est à celui qui aura le plus de succès galants, et le moins de scrupules. Peu importent les sentiments, seule la jouissance compte. Les conquêtes se succèdent de part et d’autre, jusqu’à ce que Valmont rencontre la vertu incarnée : la présidente de Tourvel. Elle est belle, douce, mariée et chaste : en un mot, intouchable. Voilà une proie de choix pour Valmont : saura-t-il relever ce défi sans tomber dans les pièges de l’amour ? De lettre en lettre, les héros dévoilent leurs aventures, échangent leurs impressions et nous entraînent dans un tourbillon de plaisirs qui semble n’avoir pas de fin.

J’aime beaucoup ce roman épistolaire sulfureux ! L’auteur exploite parfaitement son format pour exposer les faux semblants des personnages. L’alternance des points de vue met en avaleur un jeu de dupes savamment orchestré. Les différents personnages sont croqués avec finesse et précision. Difficile de ne pas résister à la redoutable Marquise de Merteuil, manipulatrice à souhait mais aussi intelligente et d’une grande finesse d’esprit. Avec son compagnon Valmont, elle éclipse facilement les niais Danceny et Cécile, les deux oies blanches qui seront les victimes de leurs manipulations.

Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand

Cyrano de bergerac d'Edmond Rostand

Désespéré par son fameux nez « qui d’un quart d’heure en tous lieux le précède », le Gascon Cyrano n’ose ouvrir son coeur à sa cousine Roxane, l’objet de sa passion. Cet homme de l’ombre aussi laid qu’éloquent prêtera donc, en secret, sa verve et sa voix à son rival plus beau, mais moins spirituel que lui…

Évidemment c’est une pièce de théâtre exceptionnelle. La plume est absolument délicieuse, pleine de panache ! Tout le monde connaît certaines répliques, comme celle du nez bien sûr. La langue claironne et palpite, c’est un vrair plaisir de lecture. Mais il y a aussi une vraie tendresse pour les personnages qui se créent, que ce soit pour le valeureux Cyrano ou la fine Roxane.

Notre-Dame de Paris de Victor Hugo

Notre-Dame de Paris - Victor Hugo

En 1831, Victor Hugo réinvente le Moyen Âge et élève un monument littéraire aussi durable que l’œuvre de pierre qui l’a inspiré. Sous la silhouette noire et colossale de la cathédrale fourmille le Paris en haillons des truands de la Cour des Miracles. Image de grâce et de pureté surgie de ce cauchemar, la bohémienne Esméralda danse pour le capitaine Phoebus et ensorcelle le tendre et difforme Quasimodo, sonneur de cloches de son état. Pour elle, consumé d’amour, l’archidiacre magicien Claude Frollo court à la damnation.

Ahalalala, mais comment écrire sur les classiques français sans évoquer Victor Hugo ? Notre-Dame de Paris m’avait ébloui de par son style, sans concession, admirable et puissant. On sent la passion de l’auteur pour les digressions, puisqu’il peut nous proposer au beau milieu du récit une digression pour exposer l’historique de telle ou telle rue, ce que j’avais trouvé très courageux (qui d’autres aurait pu se permettre cela ?). Notre-Dame de Paris est une fresque tonitruante du Paris du Moyen-Âge, parfois cruelle mais toujours colossale. Ses personnages sont touchants et multiples, terribles dans leur fragile humanité.

Mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar

Mémoires d'Hadrien - Marguerite Yourcenar

Cette oeuvre est à la fois roman, histoire et poésie. En imaginant les Mémoires d’un grand empereur romain, l’auteur a voulu « refaire du dedans ce que les archéologues du XIXᵉ siècle ont fait du dehors ». Jugeant sans complaisance sa vie d’homme et son oeuvre politique, Hadrien n’ignore pas que Rome finira un jour par périr, mais son réalisme romain et son humanisme hérité des Grecs lui font sentir l’importance de penser et de servir jusqu’au bout. « … Je me sentais responsable de la beauté du monde », dit ce héros dont les problèmes sont ceux de l’homme de tous les temps : les dangers mortels qui du dedans et du dehors menacent les civilisations, la quête d’un accord harmonieux entre le bonheur et la « discipline auguste », entre l’intelligence et la volonté.

J’avais beaucoup aimé ce récit très intimiste qui reprend la vie d’un grand empereur d’un point de vue purement interne. Marguerite Yourcenar nous livre un texte universel qui dégage une grande humanité et une grande sensibilité, entre histoire, poésie et philosophie. Hadrien fait face au temps qui passe, il fait le point sur sa vie politique et sa vie d’homme. Des passages sont particulièrement touchants, comme ceux qui concernent Antinoüs ou les ravages de la maladie décrits par l’Empereur à la fin de sa vie. J’ai également beaucoup apprécié de nombreux préceptes de vie repris des écrits d’Hadrien.

La peste d’Albert Camus

La peste - Albert Camus

« – Naturellement, vous savez ce que c’est, Rieux ? – J’attends le résultat des analyses. – Moi, je le sais. Et je n’ai pas besoin d’analyses. J’ai fait une partie de ma carrière en Chine, et j’ai vu quelques cas à Paris, il y a une vingtaine d’années. Seulement, on n’a pas osé leur donner un nom, sur le moment… Et puis, comme disait un confrère : « C’est impossible, tout le monde sait qu’elle a disparu de l’Occident. » Oui, tout le monde le savait, sauf les morts. Allons, Rieux, vous savez aussi bien que moi ce que c’est… – Oui, Castel, dit-il, c’est à peine croyable. Mais il semble bien que ce soit la peste. »

Un livre en plein dans l’actualité ! Il a fait du bruit au début de la pandémie, mais « La Peste » a toujours été l’un de mes livres préférés de Camus. Il nous y sert un récit au cordeau sur une ville qui s’isole du monde, contrainte par une peste. Certains passages fulgurants marquent au fer rouge de par leur précision et leur aspect universel. Car Camus y traite du destin unique qui touchera tous les hommes, la mort. Il l’illustre à travers une galerie de personnages qui réagissent de leur manière propre face au fléau, fléau dont l’issue semble bien souvent inéluctable.

La vie mode d’emploi de Georges Pérec

La vie mode d'emploi - Georges Pérec

La Vie mode d’emploi est un livre extraordinaire, d’une importance capitale non seulement dans la création de l’auteur, mais dans notre littérature, par son ampleur, son organisation, la richesse de ses informations, la cocasserie de ses inventions, par l’ironie qui le travaille de bout en bout sans en chasser la tendresse, par sa forme d’art enfin : un réalisme baroque qui confine au burlesque.

J’adore ce roman composite construit comme un puzzle ! Georges Pérec, membre de l’Oulipo, se lance dans un exercice de style audacieux. Entre style baroque et réalisme, il décrit la vie de chaque appartement d’un appartement parisien, et à travers chaque appartement se traduit une histoire universelle parfois loufoque, parfois tendre, parfois érudite… C’est délicat, sensible et étonnant, et peut prendre de court par aspect foisonnant et désordonné, mais aussi charmant et unique, notamment à travers ses personnages inattendus.

Germinal d’Emile Zola

Germinal - Zola

Voici, dans la France moderne et industrielle, les  » Misérables  » de Zola. Ce roman des mineurs, c’est aussi l’Enfer, dans un monde dantesque, où l’on  » voyage au bout de la nuit « . Mais à la fin du prodigieux itinéraire au centre de la terre, du fond du souterrain où il a vécu si longtemps écrasé, l’homme enfin se redresse et surgit dans une révolte pleine d’espoirs.

J’avais adoré la force qui résidait dans Germinal ! Zola décrit les luttes et souffrances des ouvriers contraints de travailler à la mine avec une précision dérangeante par moments. Il nous livre un portrait déchirant et sans concession de la condition humaine et de la révolte qui en suit, le tout avec une plume indéniablement puissante. Étienne Lantier est également une figure idéaliste très marquante.

Le comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas

Le comte de Monte-Cristo - Alexandre Dumas

Comment devenir comte de Monte-Cristo quand on est simple marin ? Ce roman est le récit d’une transformation, de celles qui affectent les créatures acculées au changement : la métamorphose. Espérant modestement devenir capitaine, Edmond Dantès se heurtera pourtant à la conspiration la plus lâche. Dans les geôles du château d’If, où il a été injustement jeté, Edmond entame la mue d’un être rivé à la plus dévorante des passions : la vengeance. Innocent décrété coupable par les calculs de ses ennemis et le cynisme de toute une époque, Dantès ne s’en laissera plus compter : à lui intrigues et dissimulation. Pour faire tomber les masques il lui faudra s’en forger un, pétri dans la rancœur des années perdues. Palpitant roman d’aventures, devenu le modèle du genre, cette traversée épique du XIXᵉ siècle précipitera les personnages de Marseille à Paris en passant par Rome et la Méditerranée. Le Comte de Monte-Cristo répond aux mesquineries du siècle par le souffle d’une odyssée.

J’avoue avoir une nette préférence pour le tome 1 de cette odyssée ! Le Comte de Monte Cristo est le récit fondateur des histoires de vengeance. Elle prend aux tripes, surtout quand on comprend le destin terrible d’Edmond Dantès. L’histoire est maîtrisée et fascinante, on se demande tout du long comment il va se venger de ses années perdues, parfois pris de pitié par des personnages qui n’ont pas pris en compte la portée de leurs actes, ou dégoûté par leur attitude prédatrice. Alexandre Dumas est ici au sommet de son art, avec un style addictif et un roman plein de panache.

J’espère que j’ai un peu éveillé votre intérêt pour certains d’entre eux ! Certains sont des monuments très connus, mais il y en a tout de même quelques uns qui sont à mon avis moins lus. Et vous, quels sont les classiques de la littérature française qui vont ont marqué durant votre vie de lecteur ?

Catégories : Littérature

14 commentaires

Light And Smell · 3 avril 2021 à 12 h 53 min

Lu récemment, Cyrano de Bergerac a été un coup de cœur. Il y a tellement de beauté dans cette pièce !

    La Geekosophe · 4 avril 2021 à 13 h 10 min

    Une de mes lectures favorites, j’adorerais voir la pièce au théâtre 🙂

      Light And Smell · 4 avril 2021 à 19 h 22 min

      Moi de même 🙂 C’est LA pièce que je rêve de voir au théâtre.

SF Elfette · 3 avril 2021 à 21 h 10 min

Je partage à fond tes deux premiers et le Dumas. Je n’ai pas lu les autres par contre (le Yourcenar ne va pas tarder à l’être ^^).

    La Geekosophe · 4 avril 2021 à 13 h 10 min

    J’espère que tu apprécieras Mémoires d’Hadrien 😉

Shaya · 4 avril 2021 à 16 h 59 min

Tant de classiques à rattraper un jour ou l’autre ! Bon Victor Hugo je passe clairement mon tour, j’ai tenté trois fois sans succès de lire Les misérables, je jette l’éponge, c’est pas pour moi. Dans les classiques marquants pour moi, La reine Margot de Dumas, et aussi L’enfant de Jules Vallès, et du Maupassant !

    La Geekosophe · 6 avril 2021 à 11 h 12 min

    J’avais pas trop accroché à « La Reine Margot » pour ma part, je note l’enfant de Jules Vallès, je connais peu cet auteur 🙂

    La Geekosophe · 6 avril 2021 à 12 h 06 min

    Pour Victor Hugo, est-ce que tu as tenté sa poésie ? Elle me semble plus facile d’accès que sa production romanesque 🙂

Ellie · 4 avril 2021 à 20 h 24 min

La Dame aux Camélias et les Trois Mousquetaires (#teamDumas)

    La Geekosophe · 6 avril 2021 à 11 h 09 min

    Je n’ai pas lu « la Dame aux camélias » tiens, et mes souvenirs des Trois mousquetaires sont très vagues, est-ce un signe ?

Mathilde Littéraire · 6 avril 2021 à 12 h 05 min

Hello,
Cela me donne envie de le refaire sur mon blog 🙂 Je me rends compte que je souhaite de plus en plus lire des classiques ! Dont plusieurs que tu as cité, comme le Comte de Monte-Cristo 🙂 !
Des bises

    La Geekosophe · 23 avril 2021 à 22 h 12 min

    Hello ! Avec plaisir, je suis curieuse de voir les sélections d’autres blogueurs !

zoelucaccini · 18 avril 2021 à 13 h 03 min

J’aime beaucoup ta liste ! Comme toi, La Peste est un de mes classiques favoris. Je l’ai lu plusieurs fois, et à chaque fois, sa lecture me glace, je trouve ce roman un peu visionnaire, sur sa fin. Le danger n’est jamais vraiment écarté…
Le comte de Monte-Cristo j’ai beaucoup aimé aussi, je l’ai lu au collège avec avoir découvert les téléfilms avec Depardieu, que j’avais bcp aimés. Et Zola, évidemment, Germinal est splendide, et ça me parle puisque je suis du Nord. Je n’ai pas lu tous les Rougon-Macquart, mais ils ont tous une identité forte et ceux que j’ai lus me restent encore en mémoire.
Victor Hugo je préfère Les Misérables, et Georges Pérec W ou le souvenir d’enfance. Mais je ne suis pas prête à le relire, c’est comme la Peste, il est terrifiant.
Je rajouterais Proust, Le temps retrouvé si je devais en choisir un. Et puis Jacques le Fataliste de Diderot, et enfin Mme Bovary, le summum du genre romanesque, où il ne se passe absolument RIEN. C’est fantastique, quand même comme roman !

    La Geekosophe · 19 avril 2021 à 21 h 44 min

    Il y a bien longtemps que je veux lire W ou le souvenir d’enfance mais il n’est même pas encore dans ma PAL ! J’avais bien aimé Proust mais pas au point de le mettre dans mes préférés, les deux autres je ne les ai pas encore lus 🙂

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