Merci beaucoup à ActuSF pour l’envoi ! Le roman avait déjà attiré mon attention lors de sa parution en grand format. La thématique d’un groupe de femmes lesbiennes tentant d’exister dans un monde qui n’accepte pas du coup je profite de sa sortie dans la collection Hélios de Passing Strange d’Ellen Klages pour me plonger dans le San Francisco de 1940. Qu’en ai-je pensé ?
Synopsis de Passing Strange
San Francisco, 1940. Six femmes, avocate, artiste ou scientifique, choisissent d’assumer librement leurs vies et leur homosexualité dans une société dominée par les hommes. Elles essayent de faire plier la ville des brumes par la force de leurs désirs… ou par celle de l’ori-kami. Mais en science comme en magie, il y a toujours un prix à payer quand la réalité reprend ses droits.
Un roman doux et singulier
Une plongée dans le San Francisco queer des années 40
La lecture fut très fluide et très instructive. J’ai particulièrement apprécié le contexte développé par l’autrice. Nous sommes aux côtés de 6 femmes lesbiennes qui évoluent dans un univers sexiste et homophobe. Le roman est donc intersectionnel. Il présente par exemple la culture alternative créée par ces minorités rejetées, notamment à travers des spectacles de drag kings avec le personnage d’Emily/Spike. Il y aussi la loi de l’époque qui se veut très punitive. Il faut que les femmes restent à leur place et ressemblent à LaFâme. Il est ainsi interdit de porter moins de trois vêtements féminins au risque de se faire arrêté. Les femmes préférant porter des vêtements d’hommes et les transgenres doivent donc faire preuve de prudence et vérifier qu’elles ont bien des frustres avec des étiquettes indiquant que ce sont des vêtements pour femmes.
Le personnage d’Helen est également très intéressante. C’est une femme asiatique, issue d’une famille japonaise présente depuis des générations aux Etats-Unis. Avocate de formation, elle a du mal à se faire une clientèle dans les années 40 misogynes. Elle travaille donc à mi-temps dans un spectacle destiné aux bourgeois comme il faut sur le thème de la Chine (parce que tout ce qui est asiatique est chinois, bien entendu). Grâce à Loretta Haskel, on voit plus la difficulté d’imposer aussi bien son travail en tant que femme mais aussi de devoir vivre séparée d’un homme violent et distant mais qui refuse le divorce. Haskel est d’ailleurs considérée comme un homme par les fans de son œuvre, ce qui est une critique directe de l’invisibilisation du travail des femmes.
Un roman fluide mais siiii court
J’ai apprécié le style de l’autrice. L’écriture nous immerge sans problème dans le passé de San Francisco. L’autrice construit très bien ses personnages, qui sont très attachantes. Elle est capable de construire en quelques mots des personnalités, de la sérieuse Helen en passant la courageuse Emily et l’artistique Haskel. Les éléments fantastiques sont discrets, saupoudrés avec parcimonie. C’est donc très bien équilibré, et c’est une lecture qui sera très adaptée aux personnes qui n’ont pas beaucoup d’appétence pour les genres de l’imaginaire. Il y a de plus dans l’édition d’ActuSF une nouvelle à la fin de l’ouvrage qui permet de mieux cerner le fonctionnement de cette magie qui n’est évoquée que succinctement dans la novella.
Ceci dit, le côté léger de la place du fantastique risque de frustrer les gros lecteurs lecteurs d’imaginaire, d’autant plus que l’un des éléments est plutôt intrigant mais pas détaillé. Comme pour beaucoup de novellas, j’ai été un peu frustrée de voir que Passing Strange était aussi court. En fait, l’univers et l’angle mis en place sont tellement singuliers, en particulier dans un roman de l’imaginaire, que j’ai trouvé qu’il aurait mérité d’être un peu plus fourni. Par exemple, l’histoire est très centrée sur Emily et Haskel alors que beaucoup d’autres personnages gravitent autour d’elles. J’aurais parfois aimé en savoir plus sur eux.
Passing Strange vaut le détour
Passing Strange séduit d’abord par son univers envoûtant et original. L’autrice nous plonge le monde alternatif queer des années 40 et construit des personnages variés et attachants. Six femmes doivent lutter dans un monde misogyne et homophobe, quitte à faire usage d’une magie subtile pour échapper aux ennuis. L’écriture est très fluide et permet de s’immerger sans soucis dans ce récit court mais entraînant. J’ai cependant trouvé dommage que le format ne permettait pas à tous les personnages d’être développés autant qu’ils l’auraient dû.
Note : 16/20
Vous pouvez acheter le livre par ici. Toutes les chroniques sont par là.
5 commentaires
Ma Lecturothèque · 1 octobre 2021 à 19 h 05 min
Je n’avais pas vu ta chronique, elle était passée sous mon radar – le Challenge de l’Imaginaire me l’a mise sous les yeux ! C’est un roman que je compte lire dans les semaines à venir, donc je suis ravie de découvrir ton retour (et de savoir qu’il peut y avoir une certaine frustration au manque de développement de certains personnages) =)
La Geekosophe · 1 octobre 2021 à 20 h 06 min
Ma bonne grosse mise à jour ! Je suis contente que le livre ait plus de visibilité grâce à sa sortie en poche 😉
Ma Lecturothèque · 3 octobre 2021 à 11 h 20 min
J’en avais déjà entendu parler à sa sortie (et heureusement car la couverture en elle-même ne me parlait pas) mais c’est vrai que je l’avais oublié… Vivement que je m’y mette ^^
Shaya · 18 octobre 2021 à 15 h 59 min
Un très très chouette roman, c’est cool que tu aies aimé !
La Geekosophe · 6 novembre 2021 à 14 h 05 min
Je suis bien contente de l’avoir lu 😉