Ce roman a été écrit dans les années 90 et c’est toujours un plaisir de voir des rééditions de livres plus anciens. Surtout que l’écrin de Délius, une chanson d’été est remarquablement belle et poétique. Sabrina Calvo nous entraîne dans une enquête entre meurtres curieux, fleurs et féérie. Qu’en ai-je pensé ?
Synopsis de Délius, une chanson d’été
XIX e siècle. Bertrand Lacejambe est un célèbre botaniste dont la particularité est de manger des fleurs, une bizarrerie culinaire qui lui vaut de de changer de couleur de cheveux au rythme de ses humeurs. Accompagné de son fidèle ami Fenby, elficologue amateur, il va braver les dangers pour démasquer un tueur dont le rituel consiste à tapisser le ventre des cadavres avec des fleurs au parfum entêtant.Sur leur route, ils sont entraînés dans une bien curieuse mélodie, faite de fleurs inconnues, de thé vénéneux, d’enfants rêveurs, de forêts hantées, de lucioles, de cauchemars et de rires.Une fantasy victorienne étourdissante pleine d’humour et de poésie et une enquête délirante, sur un ton souvent décalé.
Un récit fantasque et inattendu
Truculent et bien écrit
L’autrice choisit de mettre en scène un duo pastiche de Sherlock Holmes et Charles Watson. Lacejambe, le français botaniste aux cheveux qui changent de couleur, et Fenby, elficologue gentleman anglais, forment un duo atypique et plein de charme. Les dialogues sont ciselés et offrent de beaux moments d’échanges entre les deux. J’ai beaucoup aimé la personnalité de Fenby, très humain et empathique dans sa manière d’aborder les choses, là où Lacejambe est beaucoup plus cérébral et excentrique dans son approche. On se demande qui est Watson et Holmes, pas vrai ? Les personnages secondaires sont aussi attachants et bien écrits.
Le roman se veut très onirique, ce qui confère à la lecture une sensation très étrange d’irréalité et de poésie. La plume est très belle, emprunte d’une vraie personnalité, qui s’exprime à travers différents formats, lettre, articles, narration traditionnelle… L’autrice construit un univers très originale grâce à sa plume atypique. Elle joue également beaucoup avec des thèmes qui prêtent à la création et à rêverie. La féérie, présente mais discrète, représente très bien cet aspect. Notamment car elles voyagent à travers les rêves, des artistes en particulier.
Un roman sur l’art
Tout au long du récit, Sabrina Calvo dresse de nombreux parallèles avec les notions de créativité et d’art. C’est notamment visible à travers de multiples références. Il y a des personnages réels qui font leur apparition. Ils viennent aussi bien du monde de la musique, comme Frédérick Délius. Le monde littéraire, comme Arthur Conan Doyle. Une grande partie du mystère aussi bien sur la fameuse chanson d’été du titre que sur les poésies. Il y ainsi plusieurs scènes de bal qui animent le récit.
Il est également fait référence à un Diadème. Curieux élément, très cryptique, qui hante les rêves des artistes et s’y épanouit comme une fleur vénéneuse. Je pense qu’il s’agit d’une image de la folie créative qui anime les artistes, oscillant entre génie et démence. Mais cet aspect est resté très énigmatique, peut-être même un petit peu trop, ce qui nuit à certaines parties du roman.
On ne sait pas sur quel pied danser
Le dernier paragraphe vous laisse un court indice sur ce qui m’a déplu dans le livre. J’ai en effet eu parfois beaucoup de mal à rentrer pleinement dans l’histoire. C’est tout simplement car le scénario est parfois un peu confus. En effet, on alterne entre enquête, absurde et poésie. Des genres qui ne font pas bon ménage. Ceci pour la simple raison que le côté policier nécessite de suivre une certaine logique, logique qui est souvent réfutée par le roman.
Du coup, l’enquête fait des bonds de manière mystérieuse. On passe d’une scène à une autre sans lien scénaristique apparaissant. Il y a, il me semble, des deux ex machina. En somme, ne partez pas sur l’idée que vous allez découvrir une enquête traditionnelle à la sauce fantasy. J’ai même trouvé que les meurtres devenaient quasiment accessoires. Mais pensez plutôt que vous partez plutôt sur une histoire originale peuplée de personnages truculents dans une ambiance onirique.
Délius, une chanson d’été est un récit original mais qui manque de cohérence
J’ai du mal à dire si j’ai aimé ce roman ou si j’ai eu du mal à accrocher. Un peu des deux j’imagine. Je trouve la plume très belle, poétique et très immersive, avec une vraie recherche et une vraie singularité. Les personnages sont délicieusement excentriques, ce qui donne naissance à des scènes cocasses et des échanges qui ne manquent pas de piment. Cependant, à trop vouloir donner cette atmosphère énigmatique, j’ai trouvé que le tout manquait de cohérence, de liant. Les scènes s’enchaînent sans qu’il semble qu’il y ait de cause à effet, avec des symboles cryptiques qui laisseront les plus cartésiens d’entre vous sur le carreau.
Note : 14/20
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5 commentaires
L'ourse bibliophile · 26 novembre 2021 à 13 h 06 min
J’ai lu récemment la suite, La nuit des labyrinthes, sans avoir lu celui-ci et je lui fais les mêmes reproches que toi. Pire encore car j’ai fini par abandonner en cours de route, ayant décroché face à tant d’absurdité. Parce contre j’ai vraiment aimé cette plume travaillée, originale et poétique. Mais l’histoire était vraiment trop sans queue ni tête. Je n’exclus pas de tenter Delius un jour, mais tu confirmes mes craintes face à ce que je trouverai dans ce roman, donc je n’en fais vraiment pas une priorité !
La Geekosophe · 26 novembre 2021 à 13 h 31 min
Aaaah merci ! Je me tâtais pour lire un jour La nuit des labyrinthes mais je pense que je vais plutôt tenter la SF de l’actrice, notamment avec Toxoplasma 😉
L'ourse bibliophile · 27 novembre 2021 à 12 h 08 min
Tu peux toujours tenter si l’envie est là, mais ça sera dans la même veine…
Aller voir ses autres livres est peut-être une bonne idée finalement !
Shaya · 4 décembre 2021 à 16 h 43 min
A la fois ça a l’air chouette, mais le côté absurde artistique risque fort de ne pas fonctionner sur moi. A voir plutôt sur un autre titre de l’autrice.
C’est le 1er, je balance tout ! # 58-59 – Octobre-Novembre 2021 | L'ourse bibliophile · 1 décembre 2021 à 8 h 31 min
[…] puisse dire. La Geekosophe ne m’a guère donné envie de retenter ma chance avec le premier opus, Délius, une chanson d’été car sa chronique souligne à merveille tous les points forts mais surtout tous les points faibles […]