J’avais bien aimé l’Héritage des rois passeurs de Manon Fargetton ! J’ai entendu énormément de critiques positives sur son roman frère, Les illusions de Sav-Loar, du coup je l’avais tranquillement dans ma liseuse, dormant depuis des mois. J’ai mis un peu de temps à le sortir, mais le voilà sorti, un beau pavé de plus de 800 pages. Qu’en ai-je pensé ?

Synopsis de Les illusions de Sav-Loar

Dans le royaume d’Ombre, les femmes qui possèdent le don sont persécutées par le Clos, ordre religieux patriarcal qui voit en elles une menace. C’est dans la cité devenue légendaire de Sav-Loar, protégée par une série de sorts et d’illusions au cœur de la forêt des Songes, que se réfugient ces femmes depuis des décennies. Lorsqu’à l’adolescence, Bleue découvre ses puissants pouvoirs, elle s’allie à un groupe d’esclaves pourchassés par des hommes du Clos pour rejoindre la ville des magiciennes bannies. Au cours de ce périple dangereux, elle croisera Fèl, une beauté manipulatrice et éprise de liberté, et Til’Enarion, un redoutable membre du Clos qui traque les jeunes magiciennes pour les éliminer… Les prémices d’une guerre impitoyable se profilent entre les magiciennes et le Clos. De quel côté se rangeront Bleue, Fèl, Til’Enarion et leurs compagnons dans ce conflit ? Un mythe pourra-t-il renverser l’ordre établi ?
Leur seul espoir : rejoindre Sav-Loar, la ville des magiciennes, dissimulée au cœur du royaume d’Ombre !

Ambitieux et réussi

Un univers fouillé

Ce qui frappe très rapidement dans le roman, c’est la richesse de l’univers construit par l’autrice. En effet, on a le droit à de multiples peuples, traditions… qui se mêlent à la présence de divinités discrètes mais qui agissent sur le monde des humains, souvent par caprice ! On suit plus précisément les magiciens et les magiciennes, évidemment. Suite à des conflits passés, le Clos, organisation patriarcale traque sans relâche les porteuses de magie. Ils cherchent notamment à entrer dans la forteresse de Sav-Loar, protégée par les magiciennes depuis des siècles grâce à de puissantes illusions qui maintiennent les ennemis en dehors.

Mais l’autrice ne s’arrête pas là. Elle nous présente un univers composé de peuples différents. Marchands, pirates et esclaves se côtoient pour former un monde cohérent et dense. On suit par ailleurs différents personnages qui offrent des points de vue différents. Que ce soit au niveau du Clos, de Sav-Loar ou des personnages extérieurs. J’ai notamment beaucoup aimer les éléments liés au Dieu Gris, divinité psychopompe taboue dont les disciples sont dotés d’une très grande empathie. L’autrice a également incorporé des éléments légendaires comme politiques pour ajouter encore plus de complexité.

Un rythme prenant

Mais à mes yeux, le plus gros point fort est son rythme. Bien que le roman soit assez long, je me suis peu ennuyée. Les péripétie s’enchaînent avec une grande fluidité. Marché des esclaves, palais d’un despote, forteresse des magiciennes, fuite à travers le désert… Beaucoup de choses se passent. Mais l’autrice prend-elle le temps de poser son histoire pour autant ? Manon Fargetton a trouvé un bon équilibre en description et action pour laisser les deux éléments respirer. On découvre ainsi l’univers des Illusions de Sav-Loar tout en vivant de nombreuses aventures aux côtés des différents personnages, le tout grâce à une écriture très agréable.

Mais le rythme n’empêche pas non plus l’émotion. Au contraire, car l’autrice construit des personnages variés qui évoluent beaucoup au cours de l’histoire. On prend le temps d’explorer leur passé, souvent violent et dramatique, pour mieux expliquer leurs convictions et leur comportement. Ils sont donc extrêmement réussis et très attachants. C’est déchirant quand l’autrice prend le parti de les secouer, car elle ne fait preuve d’aucune pitié. C’est le personnage de Bleue qui en fait notamment les frais. Mais même des personnages moins présents, comme Patience, parviennent à marquer les esprits en quelques lignes.

Un discours plus nuancé qu’il en a l’air

Avant de commencer, j’avais craint une guerre des sexes peu inspirée entre magiciennes souhaitant la liberté et des magiciens misogynes. En effet, la magie des magiciennes est fortement liée à leur condition féminine. Par exemple, leur pouvoir gagne énormément en intensité lorsqu’elles sont enceintes. Leurs pouvoirs se manifestent lors de leurs premières règles… Autant d’éléments qui laissent penser que la magie est une métaphore dans ce cas de leur statut de femme. Mais l’autrice ne tombe pas pour autant dans l’essentialisation, car toute son histoire développe des individus avant des catégories de personnes.

Manon Fargetton évite l’écueil en présentant une galerie de personnages riches et bien construits. Si, en effet, certaines magiciennes éprouvent une grande méfiance en vers les hommes étant donné leur passé, de nombreuses autres, comme Néphélie, sont d’avis que les comportements sont très différents d’un individu à l’autre. Ainsi, les magiciennes comptent sur des alliés tels que Minuit, mage indépendant de caravane, Oreb, guérisseur empathique… Le récit porte avant tout sur les dangers des cercles de violences et de meurtres qui ne semble se nourrir en continu. Le récit est en effet par une très grande violence, notamment dès le début du roman, qui n’épargne rien à ses personnages.

Une autrice à suivre

Les Illusions de Sav-Loar est un coup de cœur en cette fin d’année ! C’est une réussite à de nombreux niveaux : l’histoire est très bien rythmée, c’est admirable à suivre et véritablement addictif. Les personnages sont variés et creusés, tout en nuance, avec un grand soin. Des personnages comme Bleue, Fèl ou Luernios sont inoubliables. L’univers est captivant et comporte beaucoup d’enjeux. L’ensemble n’est pas manichéen mais propose au contraire des messages et des convictions tout en nuance malgré une thématique assez risquée.

Note : 18/20

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Catégories : Chroniques

2 commentaires

Yuyine · 4 janvier 2022 à 9 h 09 min

Voilà qui donne très très très envie. Je viens de le noter de ton article des tops de l’année et je découvre toutes ses qualités dans cette belle critique.

    La Geekosophe · 6 janvier 2022 à 22 h 50 min

    Son livre compagnon, l’héritage des rois passeurs, est sympa aussi mais un peu moins abouti ! Je trouve que Manon Fargetton a vraiment trouvé sa patte avec celui-ci 🙂

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