J’ai choisi pour cette année de sortir mes bilans culture de 2021 en janvier, pour être certaine de ne pas rater un seul coup de cœur. Pour les livres, ils sont à l’image de l’année : très centrés sur l’imaginaire avec une belle percée du côté de la science-fiction. Avons-nous des coups de cœur similaires par ailleurs ?

Le goût de l’immortalité de Catherine Dufour

Le goût de l'immortalité de Catherine Dufour

Mandchourie, an 2113.
La ville de Ha Rebin dresse ses tours de huit kilomètres dans un ciel jaune de toxines. Sous ses fondations grouille la multitude des damnés, tout autour s’étendent les plaines défoliées de la Chine.
Le brillant Cmatic est mandaté par une transnationale pour enquêter sur trois nouveaux cas d’une maladie qu’on croyait éradiquée depuis un siècle. Ses recherches le mènent à Ha Rebin, où il rencontre une adolescente étrange. Avec elle, il va tenter de mener à bien sa mission dans un monde qui s’affole : décadence américaine, pandémie sanglante, massacres génétiques, conquêtes planétaires et montée de l’extrémisme vaudou. Et affronter le rêve le plus fou de l’humanité : l’immortalité, ou ce qui y ressemble…

Le goût de l’immortalité est une lecture marquante par sa noirceur. Le contexte est terrifiant et Catherine Dufour n’hésite à proposer un texte aussi cru que puissant. La plume est irrévérencieuse et accompagne ce texte avec une distance et une ironie due à la forme. En effet, le récit est une longue qui retrace les événements survenus dans la vie de la narratrice, une femme à la vie longue bloquée dans un cors de jeune adolescente, à l’esprit aussi acéré que sa langue. L’histoire est complexe et brille par l’imbrication de plusieurs arcs scénaristiques et le destin de personnages marquants. L’ensemble permet d’aborder des thématiques graves, avec une dimension existentielle très présente.

Celestopol 1922 d’Emmanuel Chastellière

Celestopol 1922 d'Emmanuel Chastellière

1922.
Une année folle à Célestopol !
Une année à la découverte des mirages et des merveilles de la cité sélène, joyau de l’âme slave arraché à la Terre, entre les mains d’un duc au destin défiant le cours du temps.
Une année où croiser dans ses rues Marie Curie, l’archiduc François-Ferdinand ou Howard Carter, mais aussi humbles ouvriers, voleur volubile ou automates au cœur de cuivre. Entre ruines lunaires à explorer, un championnat du monde d’échecs à préparer ou des complots à déjouer… Les canaux ambrés de la ville n’ont pas fini de vous dévoiler ses secrets !

Celestopol 1922 est un livre de qualité. Outre la beauté de l’objet, les nouvelles sont parfaitement maîtrisées. Celestopol nous apparaît dans tous ses paradoxes : une ville où les habitants viennent mener une existence meilleure, mais sans jamais parvenir à se départir de leurs fardeaux, y compris le duc Nikolai. On y croise une galerie de personnages variés, du plus humble au plus aisé, du plus connu aux parias qui vivent aux abords de la société. C’est une lecture dépaysante qui permet de quitter quelques heures et de se changer les idées.

La parabole du semeur d’Octavia Butler

Le nouveau président des Etats-Unis provoque une crise sans précédent. Dérèglement social et climatique, épidémies, pauvreté, violences… Dans ce décor post-apocalyptique, la barbarie règne, les murs s’élèvent. La fille d’un pasteur noir atteinte d’hyper-empathie entame la rédaction d’une Bible d’espoir et d’humanité, Le Livre des Vivants.

La parabole du semeur est vraiment un très beau roman ! La plume, acérée et efficace, d’Octavia Butler nous entraîne dans un univers quasi apocalyptique. Violent et sans concession, le roman nous amène à suivre la trajectoire de l’attachante Lauren, fille de pasteur ultra-empathique qui tente de semer l’espoir à travers une sorte de Bible spirituel qu’elle rédige. Le danger est omniprésent, notamment à travers des drogués accros à un produit qui les rend pyromanes. Face à cet élément destructeur, il est montré à quel point faire preuve de pitié et de solidarité est difficile dans un contexte où les liens humains se délitent. Le livre est une ode au soutien et à la résilience.

Les maîtres enlumineurs de Robert Jackson Bennett

Toute l’économie de l’opulente cité de Tevanne repose sur une puissante magie : l’enluminure. À l’aide de sceaux complexes, les maîtres enlumineurs donnent aux objets des pouvoirs insoupçonnés et contournent les lois de la physique. Sancia Grado est une jeune voleuse qui a le don de revivre le passé des objets et d’écouter chuchoter leurs enluminures. Engagée par une des grandes familles de la cité pour dérober une étrange clé dans un entrepôt sous très haute surveillance, elle ignore que cet artefact a le pouvoir de changer l’enluminure à jamais : quiconque entrera en sa possession pourra mettre Tevanne à genoux. Poursuivie par un adversaire implacable, Sancia n’aura d’autre choix que de se trouver des alliés.

Bon, mon avis ne va pas détonner au milieu du concert de louanges. Les maîtres enlumineurs est un excellent premier tome qui brille par bien des côtés. Son écriture et son sens de l’action, efficaces, font en sorte que l’on ne s’ennuie pas du tout. Il y a de nombreux rebondissements, particulièrement bien pensés et bien placés qui permettent de garder l’attention. Entre révélations fracassantes et mystères, c’est rapide et rythmé. L’univers est très ciselé. Tevanne est une cité qui s’inspire aussi bien, au niveau de la structure politique, de la Renaissance italienne, que du XIXe siècle pour ses aspects les plus industriels. Le système de magie est ultra original et permet de vraiment démarquer cette série du reste de la production de la fantasy. En plus d’avoir une action efficace, Robert Jackson Bennett nous livre une réflexion autour du pouvoir et de la possession. Le roman est, vous l’aurez compris, à hauteur de sa réputation.

Les oiseaux du temps d’Amal El-Mohtar et Max Gladstone

C’est ainsi que nous gagnons.
Bleu et Rouge, deux combattants ennemis d’une étrange guerre temporelle, s’engagent dans une correspondance interdite, à travers les époques et les champs de bataille. Ces lettres, ne pouvant être lues qu’une seule fois, deviennent peu à peu le refuge de leurs doutes et de leurs rêves. Un amour fragile et dangereux naîtra de leurs échanges. Il leur faudra le préserver envers et contre tout.

J’ai eu un petit peu de mal à me plonger dans le récit dans les premières pages : le style est très métaphorique, nous plongeant dans une guerre absurde où des agents tentent de changer le passé. Mais le style léché et onirique, d’une très grande poésie, finit par séduire son lecteur en même temps que l’histoire s’embraye. Le résultat est un récit touchant, à fleur de peau, à la langue audacieuse et créative, et une histoire d’amour à travers le temps et les lettres entre deux êtres que tout oppose mais que tout finit par relier. Je vous la recommande à 100% malgré son style parfois hermétique.

Fils des brumes, tome 3 : Le héros des siècles de Brandon Sanderson

Je mets le résumé du premier tome de la saga pour éviter de spoiler celles et ceux qui ne connaissent pas la saga :

Les brumes règnent sur la nuit, le Seigneur Maître sur le monde.

Vin ne connaît de l’Empire Ultime que les brumes de Luthadel, les pluies de cendre et le regard d’acier des Grands Inquisiteurs. Depuis plus de mille ans, le Seigneur Maître gouverne les hommes par la terreur. Seuls les nobles pratiquent l’allomancie, la précieuse magie des métaux. Mais Vin n’est pas une adolescente comme les autres. Et le jour où sa route croise celle de Kelsier, le plus célèbre voleur de l’Empire, elle est entraînée dans un projet fou : renverser l’Empire.

Brandon Sanderson démontre une fois de plus son talent pour les récits qui prennent aux tripes. J’avoue qu’en milieu de récit, j’ai trouvé que ça piétinait un peu. Mais c’est vite oublié face aux combats, aux moments d’espoir, de désespoir… Et surtout une fin en feux d’artifices, où on a l’impression que tout a été préparé depuis le début. Bref, c’est une très grande saga de fantasy que je conseille aux lecteurs qui aiment les systèmes de magie originaux, les univers sombres et les longs romans.

Les illusions de Sav-Loar de Manon Fargetton

Dans le royaume d’Ombre, les femmes qui possèdent le don sont persécutées par le Clos, ordre religieux patriarcal qui voit en elles une menace. C’est dans la cité devenue légendaire de Sav-Loar, protégée par une série de sorts et d’illusions au cœur de la forêt des Songes, que se réfugient ces femmes depuis des décennies. Lorsqu’à l’adolescence, Bleue découvre ses puissants pouvoirs, elle s’allie à un groupe d’esclaves pourchassés par des hommes du Clos pour rejoindre la ville des magiciennes bannies. Au cours de ce périple dangereux, elle croisera Fèl, une beauté manipulatrice et éprise de liberté, et Til’Enarion, un redoutable membre du Clos qui traque les jeunes magiciennes pour les éliminer… Les prémices d’une guerre impitoyable se profilent entre les magiciennes et le Clos. De quel côté se rangeront Bleue, Fèl, Til’Enarion et leurs compagnons dans ce conflit ? Un mythe pourra-t-il renverser l’ordre établi ?
Leur seul espoir : rejoindre Sav-Loar, la ville des magiciennes, dissimulée au cœur du royaume d’Ombre !

Les Illusions de Sav-Loar est un coup de cœur en cette fin d’année ! C’est une réussite à de nombreux niveaux : l’histoire est très bien rythmée, c’est admirable à suivre et véritablement addictif. Les personnages sont variés et creusés, tout en nuance, avec un grand soin. Des personnages comme Bleue, Fèl ou Luernios sont inoubliables. L’univers est captivant et comporte beaucoup d’enjeux. L’ensemble n’est pas manichéen mais propose au contraire des messages et des convictions tout en nuance malgré une thématique assez risquée.

Et vous, si vous ne deviez retenir qu’une seule lecture cette année ?

Catégories : Littérature

12 commentaires

Yuyine · 4 janvier 2022 à 9 h 08 min

Difficile de n’en retenir qu’une pour moi, j’en ai beaucoup trop mais Ordalie de Morgan of Glencoe, L’appel des grands cors de Thibaud Latil-Nicolas, Viendra le temps du feu de Wendy Delorme et La machine de Katia Lanero Zamora figurent en bonne place dans mon top.
Jolie sélection! J’ai très envie de découvrir La parabole du semeur après avoir adoré Liens de sang de la même autrice cette année.

    La Geekosophe · 6 janvier 2022 à 22 h 49 min

    Oooh il faudra que je me prenne Ordalie ! Je ne l’ai pas réclamé en SP de peur de ne pas avoir le temps de le lire rapidement 🙂 J’ai beaucoup aimé « Les grands Cors » également 🙂 et j’aimerais beaucoup lire Liens de sang tiens 😀 Comme d’hab on a des goûts similaires !

Zina · 4 janvier 2022 à 21 h 36 min

Voilà une bien jolie liste !

    La Geekosophe · 6 janvier 2022 à 22 h 53 min

    Merci beaucoup 😀

Shaya · 4 janvier 2022 à 22 h 51 min

Sympa cette liste, même si je n’ai lu que La parabole du semeur dedans ! (j’avais été un peu frustrée car ne sachant qu’il s’agissait d’un premier tome ;))

    La Geekosophe · 6 janvier 2022 à 22 h 55 min

    Oui, apparemment l’autrice avait prévu quelque chose comme 5 tomes mais n’en a concrétisé que deux ! Après je trouve que la parabole du semeur se tient bien en one-shot 🙂

Emmanuel · 5 janvier 2022 à 6 h 55 min

Quelle belle liste. :p

    La Geekosophe · 6 janvier 2022 à 22 h 56 min

    Surtout une certaine proposition qui commence par un C, n’est-ce pas ? :p

yogo · 5 janvier 2022 à 19 h 17 min

Il va vraiment falloir que je jette un oeil sur ce monde. Tout le monde en dit du bien, tu penses que je passe à côté de quelque chose !! 😉

    La Geekosophe · 6 janvier 2022 à 23 h 34 min

    hahaha sûrement ! Même si j’avoue que je ne sais pas trop de quel livre tu parles X)

Le Maki · 5 janvier 2022 à 19 h 19 min

Ca manque quand même de SF, non ?!
😉

    La Geekosophe · 6 janvier 2022 à 23 h 36 min

    Il en faut encore plus !!!

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