Afterland de Lauren Beukes m’a fait bien envie. D’abord, la couverture d’Aurélien Police est, comme d’hab, sublime. Mais vous me connaissez : une histoire où tous les hommes ont quasiment disparu ? Je prends ! Je connais également déjà le style de l’autrice sud-africaine grâce à Moxyland, qui oscille entre dystopie et cyberpunk. Afterland propose quelque chose de complètement différent ! Qu’en ai-je pensé ?

Synopsis d’Afterland

Trois ans après une pandémie qui a tué 99 % des hommes, la vie continue et le monde est dirigé par des femmes. Cole veut à tout prix élever son fils Miles, 12 ans, un des rares garçons à avoir survécu, à l’abri des convoitises qu’il suscite. Traquée par Billie, son implacable sœur, elle n’a d’autre choix que de travestir Miles et de prendre la route.

Un thriller post-apo original

Un parti pris bien tenu

Lauren Beukes place son histoire aux États-Unis. A quoi ressemblerait la société sans les hommes ? Avec une moitié de l’humanité en moins, le monde ressemble fortement à une dystopie post-apocalyptique. Les hommes sont morts d’une maladie hautement transmissible qui se transforme en cancer de la prostate virulent, maladie qui ne se manifeste que sous la forme d’un rhume chez les femmes. Pas de chance. En six mois, le monde connaît des bouleversements hors normes : on manque de main-d’œuvre dans les métiers très masculinisés, les rares hommes survivants deviennent des raretés. Ils sont donc souvent chassés ou exploités pour leur sperme, ou vivent dans des zones protégées par l’État. Évidemment, qui dit denrée rare dit convoitise et réification. Et Miles, fils de Cole, en fait les frais. Pire, sa propre tante a tenté de l’enlever.

L’autrice nous met très bien face à un monde en déliquescence. Loin de proposer un matriarcat idyllique, l’autrice opte pour le transitoire. Sans que ce soit la fin, on sent qu’on est au cœur d’une période d’instabilité. Cole et Miles traversent le pays, Billie à leurs trousses, rencontrant toutes sortes de personnes qui construisent un portrait composite d’États-Unis toujours en proie à ses vieux démons. Bienveillantes, malveillantes. Souvent étranges. Car c’est aussi le récit des branches auxquelles on tente de se raccrocher. La drogue. La religion. Le roman est accrocheur et mené au cordeau, notamment dans sa première partie.

Mi-figue Mi-raisin

Mais Lauren Beukes a vraiment une façon particulière de faire les choses. Si son récit prend une idée ambitieuse, il faut d’abord se faire au style rauque et dur de l’autrice. Elle n’a pas une écriture vraiment agréable au sens premier : elle aime changer de registre, écrire des personnages antipathiques… Bref, ce n’est pas le genre de roman facile à lire que je conseillerais à tout le monde. D’autant plus qu’elle nous partage des moments un peu trash et barrés, comme cette congrégation de sœurs du Chagrin complètement barrée qui ne convainc pas totalement. Ou les moments les plus azimutés de Billie, qui n’a clairement pas toute sa tête.

Pourtant le récit aborde avec justesse de nombreux sujets. Les enjeux sociétaux comme la disparition des hommes ou la désertion des métiers masculins, celui de vivre dans un monde bouleversé. Mais aussi les enjeux au niveau plus personnel. La relation mère-fils est bien mises en scène et valorisée, de même que la relation complexe entre deux sœurs au caractère puissant. Miles, jeune garçon travesti en jeune fille, doit assumer cette nouvelle identité dans un monde où son sperme est considéré comme de l’or blanc. Dommage que le roman soit parfois un peu lent et décousu en milieu de lecture. Les grandes thématiques perdent en cohérence.

Afterland est au cordeau mais il manque un quelque chose

Road-movie post apo au goût de thriller, Afterland est un roman au ton acre. Il repose sur trois personnages au coeur d’un univers transitoire bouleversé. Cet aspect est intéressant, puisque nous faisons face à une société qui se réorganise autour de l’extrême rareté des hommes. Les ressources les plus précieuses ne sont plus celles qu’on pense. Miles est donc poursuivi, par sa propre tante notamment, et sa mère tente de le protéger. La dynamique entre les trois personnages est bien menée et crédible. Mais Lauren Beukes tente de mêler trop d’éléments composites pour que ce soit réellement cohérent par moments : road-trip, post-apo, thriller, récit de secte, hippie… Cet aspect est renforcé par son écriture directe et déstabilisante, qui ne plaira clairement pas à tout le monde !

Note : 14/20

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Catégories : Chroniques

9 commentaires

zoelucaccini · 14 février 2022 à 13 h 55 min

Je pense que je vais passer mon chemin, ce n’est pas du tout mon style. Ca me fout le cafard les récits post-apo comme ça :-/
Mais fort sympa ta chronique, on voit tout de suite les grandes lignes qui caractérisent le roman.
Et je ne connaissais pas du tout l’autrice, merci pour la découverte !

    La Geekosophe · 18 février 2022 à 22 h 55 min

    C’est pas le post-apo le plus déprimant que j’ai lu ! Mais ce n’est jamais bien joyeux

Lutin82 · 15 février 2022 à 21 h 54 min

Ah! Un retour un poil mitigé. Je verrai bien, il est dans ma PAL.

    La Geekosophe · 18 février 2022 à 23 h 17 min

    Ce sont des choses qui arrivent, mais le roman ne manque pas d’atouts pour autant 🙂

Yuyine · 18 février 2022 à 10 h 17 min

Il y a en effet beaucoup de choses dans ce roman et sans doute un peu trop dans l’excès par instants pour garder une certaine crédibilité. Mitigée également même si certains aspects sont franchement intéressants

    La Geekosophe · 18 février 2022 à 23 h 17 min

    On ne peut pas reprocher à Lauren Beukes de ne pas y aller à fond !

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