La saga Kushiel avait éveillé mon intérêt il y a déjà quelques années. cette série de livres de fantasy est très réputé chez les connaisseurs. Je me suis donc pris La Marque pour enfin me plonger dans cet univers particulier. Il est vrai que le résumé prédit un thème aussi risqué qu’original, qui promet en tout cas de rencontrer une histoire bien distincte que le genre habituel.

Synopsis de La marque

Phèdre nó Delaunay porte la marque de Kushiel, qui lui vaut d’éprouver à jamais le plaisir dans la souffrance. Enfant, elle a été vendue à un noble qui a su reconnaître chez elle ce don cruel, et elle est devenue depuis la plus convoitée des courtisanes… ainsi qu’une espionne exceptionnelle. Lorsqu’elle découvre le complot qui pèse sur sa patrie, Phèdre se lance dans une aventure épique et déchirante, semée de trahisons, et qu’il lui faudra mener jusqu’au bout pour sauver son peuple.Laissez-vous séduire par un monde vénéneux peuplé de conspirateurs, de monarques assiégés et de seigneurs de guerre barbares… et surtout par Phèdre, une héroïne hors du commun.

Un roman dense, sulfureux et captivant

Une histoire riche et ciselée

Jacqueline Carey place son histoire dans un univers uchronique. Dans son monde, après que Jésus ait été crucifié, le sang de Marie-Madeleine a donné naissance à Elua, dont le culte a surpassé celui du christianisme, absent. Il y a ainsi de nombreux territoires auxquels il est fait référence. Terre d’Ange est en grande partie en France, les Skaldiques sont des populations scandinaves, Alba et Eire l’Angleterre et l’Irlande… C’est à la fois familier et différent. Tout l’intérêt est de voir les dynamiques entre ces différentes terres autour de jeux politiques subtiles et complexes. Cela est bien présenté car le personnage principal, Phèdre, joue un rôle de renseignement important qui lui permet d’avoir vent de nombreuses intrigues. Mais l’autrice a la finesse de nous donner quelques indices sans révéler toutes ses cartes. L’histoire est donc pleine de rebondissements et bien menée.

Il y aussi de grosses différences sociales et culturelles. En l’absence du christianisme, cette autre religion a construit une des valeurs différentes, que nous explorons notamment à travers les suivants de Naamah, aussi appelé la Cour de la Nuit. Bien que le mot soit rarement utilisé, les personnes vouées au culte de Naamah pratiquent une forme de prostitution en Terre d’Ange. Phèdre, le personnage principal, fait partie de la Cour de la nuit et nous comprenons que dans son univers, le sexe est perçu comme une faveur courante et normalisée. Il y a de nombreuses scènes érotiques, mais elles sont bien écrites et participent à la construction du personnage et à la compréhension de sa particularité. Ainsi, elles sont beaucoup moins nombreuses dans la deuxième partie du roman, lorsqu’elle quitte le service de Naamah et que les enjeux politiques sont plus puissants.

Des personnages bien travaillés portés par une écriture prenante

Le roman, long , propose une galerie de personnages finement décrits. Les protagonistes comme les antagonistes ne sont pas manichéens. Au contraire, ils dévoilent un grand nombre de nuances au fil des pages. Que ce soit Phèdre, tout d’abord surtout intéressée par le service de Naamah mais qui doit trouver plus de ressources en elle lorsque sa vie est bouleversée. Pareil pour Joscelin, un moine soldat chargé de sa protection, qui évolue beaucoup au fil des épreuves. On compte par ailleurs beaucoup de personnages secondaires tout aussi bien écrits, même si moins présents et moins longtemps, et beaucoup de diversité. La saga diffère d’autres romans de fantasy en s’appuyant beaucoup sur la psychologie, la finesse et la manipulation. Le talent de Phèdre est de connaître les motivations profondes de ses clients et de faire le lien avec la situation géopolitique et leur histoire. Mais attention, le roman n’est pas que paroles et manigances ! L’autrice n’hésite pas à décrire des éclats de violences, des trahisons et la brutalité de la politique.

Il était facile de tomber dans la vulgarité en optant pour un sujet aussi sensible. Si l’érotisme est bien présent, avec un penchant pour le SM, la plume de Jacqueline Carey est délicate. Comme dit plus tôt, on ne tombe jamais dans la vulgarité, ni dans la niaiserie. Au contraire, l’écriture est emprunte de poésie quand il le faut, est plus directe dans l’action et prend le temps de développer les personnages et les situations. Ce bon dosage est également perceptible dans le rythme. Même si le roman fait plus de 1000 pages, on ne sent pas de longueurs ou de ralentissements. Jacqueline Carey a construit une histoire avec de nombreuses péripéties : voyages, trahisons, disgrâces, enquêtes, guerres… Tout est présent. On pourrait peut-être dire que l’entrée en matière est longue, mais j’ai trouvé cette introduction consacrée à l’enfance et l’adolescence de Phèdre essentielle pour comprendre le personnage et tout un pan de la culture de Terre D’Ange.

La marque pose le début d’une excellente saga fantasy

Un premier tome à la hauteur de sa réputation ! Entre espionnage, politique et conflits, La marque met en scène un univers fascinant, proche de l’uchronie. L’intrigue ne souffre d’aucune longueur, au contraire. Les péripétie sont nombreuses, nous menant de voyages en combats, de trahisons en négociations. Le tout est mis en avaleur par une plume d’une grande qualité. Jacqueline Carey offre un texte fluide qui jouit d’un sens exceptionnel de la mesure : juste ce qu’il fait de descriptions, d’actions et d’introspection. Enfin, elle crée également une galerie de personnages aux caractères et motivations qui leur sont propres, apportant nuance et complexité à chacun d’eux, antagonistes comme protagonistes.

Note : 18/20

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Catégories : Chroniques

7 commentaires

Shaya · 29 janvier 2023 à 20 h 15 min

Honnêtement le côté SM/érotique m’embête un peu malgré ta critique élogieuse. Je pense passer mon tour ce coup-ci ^^

    La Geekosophe · 16 mars 2023 à 23 h 37 min

    C’est sûr que c’est un point qui peut freiner !

Brize · 30 janvier 2023 à 13 h 15 min

Il me semble que j’en avais déjà entendu parler, mais sans m’y arrêter (sans doute à cause de la couverture précédente, moins attractive). Ce que tu en dis (sauf le penchant SM pour l’aspect érotique) est suffisamment tentant pour que je note ce tome 1.

    La Geekosophe · 16 mars 2023 à 23 h 36 min

    J’avais beaucoup hésité avant de lire ! Je ne savais pas du tout à quoi m’attendre mais c’était une très bonne lecture !

Symphonie · 4 février 2023 à 17 h 17 min

Ca fait un moment que je l’ai lue, mais j’avais beaucoup aimé la première trilogie alors que de base je ne suis pas attirée par ce genre de thématiques 🙂

    La Geekosophe · 16 mars 2023 à 23 h 38 min

    Moi non plus, mais j’en avais entendu tellement de bien que je me suis lancée 😉

[Chronique] Kushiel, tome 1 : La marque, de Jacqueline Carey – Sometimes a book · 7 février 2024 à 6 h 07 min

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