Du bon gros space opera au programme ! Mais avec Pandore abusée, Peter Hamilton surprend en proposant des éléments qui créent un univers unique qui trouve sa marque en comparaison d’autres sagas spatiales. S’il y a plusieurs romans, il s’agit en réalité d’une histoire complète.

Synopsis de Pandore abusée

En 2380, l’humanité a colonisé six cents planètes, toutes reliées entre elles par des trous de ver. Le Commonwealth Intersolaire s’est développé en une société tranquille et prospère, dans laquelle la  » réjuvénation  » permet à chaque citoyen de vivre pendant des siècles. C’est alors qu’un astronome est témoin d’un incroyable événement cosmique : la disparition d’une étoile à un millier d’années-lumière, emprisonnée dans un champ de force d’une taille gigantesque. Le Commonwealth décide d’en savoir plus. Contre l’avis d’une partie de l’opinion, il construit le premier vaisseau spatial plus rapide que la lumière : la Seconde Chance. Sa mission sera de découvrir quelle menace pèse sur l’espèce humaine…

Un récit profus, intelligent, mais qui peut perdre son lecteur

Trous de vers et quasi immortalité, vers le futur de l’humanité

Ce qui fascine dans un premier temps, c’est l’univers que l’auteur construit avec soin. Peter Hamilton ancre son récit dans le fait que plusieurs évolutions technologiques, amenant des évolutions sociales en plus, jouent sur l’humanité. Dans un premier temps, cette humanité s’est étendue à travers les étoiles, mais pas avec des vaisseaux spatiaux. On échappe dans un premier temps aux lieux communs du space opera. Les vaisseaux spatiaux existent dans l’univers de Pandore, mais sont finalement rarement utilisés en dehors de l’exploration. Il s’agit de trous de ver permettant de voyager très rapidement d’une planète à une autre. Le Commonwealth est ainsi divisé en myriades de planètes avec ses propres cultures, spécialités ou peuples d’origine et forme le Pouvoir humain en place dans la galaxie. C’est un enchevêtrement à la fois complexe, mais pas si différent de la logique terrienne.

Autre point qui joue beaucoup, la plupart des humains sont devenus presque immortels en étant capables de rajeunir autant de fois qu’ils le veulent via des cures de jouvence. Comme dans Carbone modifié, ils sont également capables de sauvegarder leurs souvenirs et peuvent même revenir d’entre les morts, mais peuvent également effacer certains souvenirs qu’ils jugent encombrants s’ils le souhaitent. Les ultrariches peuvent se permettre de larges périodes sans travailler, mais les inégalités sociales ne sont pas abordées en profondeur, ce qui est dommageable (ce n’est pas du cyberpunk 😉 ). Ces grandes familles richissimes ont beaucoup de pouvoir et forment des clans étendus. Les structures sociales en sont changées : certains choisissent d’avoir plusieurs partenaires, et les relations monogames sont, quand elles existent, avec une date d’expiration, à cause de la lassitude. Ensuite, Hamilton pointe cette évolution comme problématique sur une donnée : la population vieillissante et ayant tout son temps, la société a finalement peu évolué en quelques siècles. Certains personnages mettent en avant le manque d’innovation de cette société, qui semble naître d’une forme de conservatisme chez des dirigeants restant plusieurs dizaines d’années au même poste. Des détails qui montrent l’auteur a pensé et construit son univers avec soin, allant même à l’encontre des poncifs de la SF.

Des personnages et des lieux à foison

Ce tome a pour spécificité d’être très introductif, ce qui peut déplaire. La saga est pensée comme une unique et même histoire, d’où une longue mise en bouche pour placer l’ensemble de ses pions. Hamilton présente aux lecteurs un grand nombre de personnages. Ils ont des origines variés et pendant le premier quart, je me suis demandée comment l’auteur allait raccrocher les wagons pour construire une histoire cohérente à partir de fragments d’histoires qui n’ont rien à voir les uns avec les autres. Une enquête sur une affaire classée par ci, un scientifique qui découvre qu’une étoile est artificiellement cachée, une secte persuadée qu’un extra-terrestre mal embouché tente de faire chuter l’humanité, l’un des scientifiques qui a découvert les trous de vers tente de percer les secrets d’une espèce extra-terrestre qui parlent comme le Père Fourras… Autant vous dire qu’il faut bien être attentif entre la multitude de noms et de concepts qui sont lancés.

Mais petit à petit, l’auteur nous emmène dans une histoire captivante qui prend tout son sens à la fin. Car chaque personne citée va avoir un lien avec un événement extraordinaire et funeste. Pandore abusée est également l’occasion de découvrir de nombreux endroits. Les plus mémorables sont ceux liés aux extra-terrestres. Ces derniers sont présents mais ne sont pas le point de focalisation de l’histoire. Le Commonwealth se mêle assez peu à leurs cultures, ce qui s’explique car ils sont trop différents des humains. On découvre ainsi les Silfens, une espèce énigmatique, les Raiel, énormes êtres capables de revivre des souvenirs qui habitent dans l’Ange des hauteurs, un vaisseau intelligent mais toujours aussi opaque dans son raisonnement. La planète Far Away est celle qui m’a le plus intéressé car elle est étroitement lié au fascinant mythe de l’arpenteur des étoiles, une mystérieuse entité extra-terrestre qui manipulerait le Commonwealth. Planète la plus éloignée du système solaire, elle abrite le Marie céleste, vaisseau dont serait sorti l’arpenteur. En miroir, une communauté luttant contre l’influence de cette entité y est également présente, avec une culture et une société radicalement différentes. Sa structure s’inspire des clans des Highlands et elle ne semble avoir accès à autant de technologie que le reste de la galaxie, ce qui donne l’impression d’être moins développée.

Pandore abusée, première pierre d’une histoire monumentale et fouillée

« Pandore abusée » de Peter Hamilton offre aux lecteurs un univers de space opera loin des poncifs du genre en faisant des choix qui ne manquent pas d’audace dans l’évolution de l’humanité à travers le temps et l’espace. Quasi Immortalité, voyage rapide, le Commonwealth a gout d’utopie pour les classes les plus riches, ce qui donne une progression sociale de l’humanité fascinante même si l’analyse n’est pas toujours poussée très loin. On sent que Peter Hamilton a travaillé de manière approfondie pour proposer un univers cohérent et bien construit, déployé au travers de multiples personnages et points de vue. Ce n’est donc pas une SF toujours facile d’accès : les personnages sont nombreux et la première partie de ce tome met du temps à s’installer. D’autant plus que les arcs narratifs, de prime abord disjoints, peuvent perdre le lecteur qui aura du mal à y voir ce qui relie cette vaste galerie de personnages. La deuxième partie, prenante et bien réalisée, raccroche tous les wagons et donne très envie de lire la suite.

Note : 16/20

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Le roman comptant 696 pages dans sa version papier, je fais une doublette challenge avec le pavé de l’été et le Summer Star Wars.

Catégories : Chroniques

2 commentaires

Sibylline · 15 juillet 2023 à 17 h 14 min

Je ne lis pas du tout ce genre de romans, mais justement, des blogs comme le tien me permettent de voir ce qui se fait en dehors de ma sphère. C’est intéressant.

    La Geekosophe · 21 août 2023 à 23 h 27 min

    Héhé je suis l’une des rares lectrices de l’imaginaire du pavé de l’été !

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