Retour vers la plume distincte de Michael Roch ! Les choses immobiles met en scène une Martinique dans un futur proche. Loin de l’univers ultra techno de Tè Mawon, l’auteur propose un texte plus intimiste mais aussi plus proche de notre époque, alors que l’île n’est pas encore indépendante. Merci aux éditions Mu pour l’envoi. Qu’en ai-je pensé ?

Synopsis de Les choses immobiles

Au décès de son père, un jeune homme revient a la Martinique. Accueilli par son frère, il va découvrir l’envers d’une île que la France abandonne, une île en proie a des bouleversements écologiques et sociaux, une île ou tout a définitivement change … comme lui. Poursuivi par ses démons hexagonaux et les visions d’une étrange anguille spectrale, Charles va s’engager peu a peu, entre relations fraternelles tendues et amours multiples, aux côtés des indépendantistes.

Une plongée fiévreuse dans la révolte

Retour au péyi

L’histoire commence avec Charles et le décès de son père, comme un miroir de L’étranger de Camus. Le jeune retourne à ses racines. Son frère l’accueille, lui trouve un appart. En échange de quelques boulots. Apollon est très actif dans les actions pour l’indépendance de la Martinique. Quel étrange narrateur que ce Charles, donc, qui reste à la marge, semblant bien moins intéressé par la politique que les hommes et femmes qu’ils croisent. Il est hanté par un passé que l’on devine petit à petit, qui rend la relation entre deux frères difficiles. Mais est-il aussi peu investi qu’on peut le penser ? Charles est métis et a passé une grande partie de sa vie en France métropolitaine. Il est donc une sorte de transition non finie, comme une esquisse. Ni noir, ni blanc. Ni local, ni étranger. Un entre deux.

Un entre deux qui se traduit dans son comportement. Charles souhaite renouer avec son frère mais il ne peut pas s’empêcher d’être attirer par la compagne de celui-ci. Il ne parvient pas toujours à réussir les taches qu’on lui confie. Charles est un personnage marqué par ses doutes et une forme de mollesse. Cet aspect est traduit par les introspections aiguës écrites par Michael Roch, qui donne une roman une certaine chaleur, mais aussi un coté très centré sur le personnage. En conséquence, les remouds de la Martinique semblent venir en arrière-plan, en filigrane, pour gagner en puissance sur quelques passages qui nous permettent de mieux comprendre les enjeux.

Ile et narration fracturées

Car les choses immobiles n’oublie pas ses enjeux. Nous sommes dans un futur proche. La Martinique semble avoir été oubliée des pouvoirs français et laissée à l’abandon. Le danger vient des eaux surtout. Elles semblent en grande partie empoisonnées et non consommables. Une scène marquante a lieu alors que des pluies torrentielles se déversent sur la ville, créant des inondations intenses. Les frustrations nourrissent la rébellion. Les habitants se tournent vers leurs origines pour rejeter l’envahisseur. Comme dans Tè Mawon, le Créole a une place importante comme élément structurant d’une identité unique et métissée, mais les mots sont moins présents, comme si cette identité restait trop diluée, pas tout à fait libre, comme une posture plutôt qu’une réalité tangible.

La narration est à cette image. Michael Roch nous propose son histoire à travers des paragraphes courts et incisifs. Un angle de vue rapide. Une scène, une langueur, un éclat de violence. Comme dans ses précédents textes, l’auteur fait preuve d’une grande virtuosité dans la maîtrise de la langue. On se surprend à noter beaucoup de citations, juste pour la musicalité des mots ou la chaleur des images. Cela donne à la narration un aspect décousue, mais cela participe à comprendre, par parcelles, aussi bien la situation complexe de l’Ile que la psychologie de Charles.

Les choses immobiles renforce la singularité de Michael Riche dans l’imaginaire francophone

« Les choses immobiles » mêle habilement l’intime et le contexte plus large de la future société martiniquaise. L’auteur offre une plongée émotionnelle dans les conflits internes de ses personnages tout en offrant un aperçu subtil des enjeux sociaux et environnementaux qui façonnent le destin de l’île. L’auteur tisse un récit captivant en utilisant une narration fragmentée et des paragraphes incisifs qui capturent des moments clés de l’histoire. L’île, en proie aux conséquences des négligences françaises et à des enjeux écologiques, se manifeste en arrière-plan. Cependant, cet aspect fragmenté et l’écriture complexe peuvent rendre ce récit difficilement accessible à des lecteurs qui n’ont pas l’habitude des œuvres de l’auteur.

Note : 16/20

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Catégories : Chroniques

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