Un ami m’a offert le K de Dino Buzzati pour mon anniversaire. C’est parfait car je souhaitais lire plus de classiques. Je lis habituellement peu de nouvelles mais le ton fantastique de beaucoup d’entre elles m’a plu. Ce recueil en contient 51 au total, ce qui a assez impressionnant ! Alors qu’ai-je pensé de monument de la littérature italienne ?
Synopsis de le K
L’histoire du « K », qui donne son titre au recueil, contient tous les thèmes familiers à Dino Buzzati, l’auteur du « Désert des Tartares », et définit parfaitement un art où le merveilleux et l’humour se mêlent à l’observation lucide avec une maîtrise que confirment les cinquante autres récits suivants. Une sensibilité exacerbée, un sens aigu de la justice, un certain pessimisme aussi donnent une résonnance poignante au « Compte », à la « Petite Circé », à « L’Ascenseur », au « Veston ensorcelé », par exemple. Le fantastique de Buzzati est étroitement accordé à l’air de notre temps et aux préoccupations du jour : la guerre mondiale, la dictature, le mal de la jeunesse et la solitude, comme en témoignent « Chasseurs de vieux », « La Leçon de 1980 » ou « Suicide au parc » et « L’Arme secrète ».
Un recueil de nouvelles délicat et onirique
Des récits emprunts d’angoisse existentielle
Imprégnée d’éléments absurdes, fantastiques et d’un humour mordant, l’ambiance de ces récits est profondément sombre, voire déconcertante. La lecture donne l’impression de parcourir une série d’événements anodins, peut-être liée à la formation journalistique de l’auteur, chacun dissimulant un sens caché. Ils révèlent successivement nos solitudes, nos fantômes, nos vertiges, nos attentes, nos folies, le temps, la vieillesse, la mort, et mille autres aspects selon la perception individuelle. On sent chez l’auteur un certain sens du nihilisme, comme si ce qui nous guidait avait quelque chose de profondément vain, inutile, pour nous faire sentir proches de l’insignifiance.
À travers un subtil mélange de vraisemblance et d’invraisemblance, d’absurdité et de rationalité, Buzzati met en lumière la dimension fantastique de la vie. On ressent alors que, à n’importe quel moment de nos existences, à partir d’un élément apparemment anodin, quelque chose d’inquiétant peut surgir brusquement, ébranlant, voire détruisant nos croyances et nos certitudes. Les personnages de Buzzati semblent être atteints d’une forme de malédiction, parfois même littéralement, ce qui ajoute au vide existentiel qui habite ces différents récits. C’est comme une prise de conscience de la petitesse de sa propre existence. Par exemple, dans la nouvelle Le K qui donne son titre au recueil, l’auteur semble souligner à quel point les hommes ont tendance à fuir en avant, manquant l’essentiel au passage et ne s’en apercevant qu’aux portes de la mort.
Drame, absurde et ironie
La plume de Buzzati fait mouche. Il a un style fluide qui se laisse suivre facilement. Entre exagérations et sens du sordide, il ne manque pas d’un certain humour noir, d’une ironie mordante et pathétique. Le tragicomique constant de ces nouvelles est parfaitement dosé. En conséquence, nous avons de nombreuses interprétations possibles à partir de ces courtes histoires, ce qui fait partie du génie de l’œuvre. L’auteur ne donne jamais de réponses toutes faites, ce qui fait également la force de certaines nouvelles. En quelque sorte, c’est parfois au lecteur d’y trouver sa propre explication à travers son angoisse existentielle.
J’ai par exemple été très marquée par les progressions, de courts textes qui évoluent très vites. L’exercice de style m’a rappelé l’Oulipo, dont les contraintes d’écriture sont très marquées. Cependant, il est vrai que les historiettes n’ont pas toutes le même impact. Notamment car les chutes manquent parfois un peu de mordant ou que certains textes sont trop opaques pour rester en mémoire. C’est souvent le cas sur les recueils qui réunissent un grand nombre de textes. On sent que certaines nouvelles sont un exercice de style plutôt qu’une volonté de l’auteur de distraire un lecteur.
Le K est un recueil de nouvelles marquants et bien ancrés dans l’existentialisme
Buzzati, maître du fantastique, explore avec une sensibilité exacerbée des thèmes universels tels que la solitude, la jeunesse, la guerre, et la mort. À travers un subtil mélange de vraisemblance et d’invraisemblance, l’auteur met en lumière la dimension fantastique de la vie, soulignant la fragilité de nos certitudes et la petitesse de notre existence. La plume fluide de Buzzati, teintée d’humour noir et d’ironie mordante, entraîne le lecteur dans des progressions rapides, rappelant par moments l’esprit de l’Oulipo. Cependant, la diversité des nouvelles engendre des réactions variées, certaines histoires laissant une impression plus marquante que d’autres. Cela contribue à enrichir les multiples interprétations possibles, laissant au lecteur le soin de trouver sa propre signification au travers de cette angoisse existentielle.
Note : 17/20
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