Je fais partie de ces gens qui ont du mal à se lancer dans des romans dont on parle trop. Avec son prix Hugo, puis les deux autres tomes qui en avaient reçu également, La cinquième saison exerçait sur moi une attraction particulière mais je remettais sa lecture à plus tard, animée par deux peurs. La première était d’être déçue. La seconde, aimer tant ma lecture que je regretterais d’avoir perdu l’occasion de découvrir à nouveau une oeuvre exceptionnelle.

Synopsis de La Cinquième saison

La terre tremble si souvent sur votre monde que la civilisation y est menacée en permanence. Le pire s’est d’ailleurs déjà produit plus d’une fois : de grands cataclysmes ont détruit les plus fières cités et soumis la planète à des hivers terribles, d’interminables nuits auxquelles l’humanité n’a survécu que de justesse. Les gens comme vous, les orogènes, qui possédez le talent de dompter volcans et séismes, devraient être vénérés. Mais c’est tout l’inverse. Vous devez vous cacher, vous faire passer pour une autre. Jusqu’au jour où votre mari découvre la vérité, massacre de ses poings votre fils de trois ans et kidnappe votre fille. Vous allez les retrouver, et peu importe que le monde soit en train de partir en morceaux.

Un oeuvre de grande ampleur

Un word-building soigné

Il est difficile de commencer la critique d’un roman qui arrive à créer un monde aussi étrange que familier. Commençons donc par cette partie. N.K. Jemisin parvient à construire un univers extrêmement vaste qui obéit à des règles spécifiques qu’elle nous précise au fil du roman. Jamais elle ne nous noie sous les détails des techniques, jamais elle ne nous laisse dans l’incompréhension totale. Elle crée un monde cohérent qui brille par son originalité, mais qui semble aussi extrêmement crédible.

Le Fixe, cet unique continent, est imprévisible et dangereux. Il est traversé de vastes catastrophes appelées des saisons, amenant régulièrement le reste de l’humanité au bord de l’extinction. Secousses sismiques, tsunamis, éruptions volcaniques… Curieusement, l’humanité parvient à surmonter ces difficultés. Les hommes s’organisent de manière spartiate en classes dont le rôle est attribué très clairement. On peut y décerner quelques éléments dystopiques dans cette façon dirigiste de voir les choses, car ceux qui n’ont pas de caste attribuée sont contraints à survivre hors société. 

A noter que l’univers dispose aussi bien d’éléments associés à la science-fiction (présence profuse de la science, transhumanisme, post-apo…) et de la fantasy (avec notamment un système qui s’apparente à de la magie…)

Une dernière partie de la société concerne les orogènes. Mutants ou magiciens, ceux-ci sont en résonance avec le pouvoir du Père Terre et capables de contrôler certains événements (tremblements de terre…). Ils sont craints car leurs capacités leur confèrent une grande affinité avec ce qui menace régulièrement le monde. Leurs pouvoirs me rappellent en cela l’allomancie dans Fils-des-Brumes de Brandon Sanderson, dans la façon de bâtir un système à la fois original et d’une grande rigueur. 

Des personnages qui ont du corps

Nous suivons trois points de vue, trois femmes orogènes. Damaya, une fillette qui entre au Fulcrum pour y suivre l’enseignement qui lui apprendra à contrôler ses capacités. Syénite, une orogène plus avancée dans son enseignement qui est contrainte de faire équipe avec un autre orogène plus puissant pour avoir un enfant avec lui. Enfin, il y a vous, Essun. Une orogène cachée dont l’un des enfants est tué par son mari, le second enlevé. Ces trois points de vue offrent une vision complète de la situation d’orogène et donne au lecteur l’accès à des connaissances multiples au vaste univers de la cinquième saison.

N.K. Jemisin fait preuve d’un talent remarquable pour construire des personnages humains. Nos personnages principales sont convaincantes, parfois attachantes, parfois énigmatiques, parfois pénibles… Et les secondaires ne sont pas en reste ! le mystérieux Hoa, par exemple, est une réussite. Personnage dont on ne sait pas grand chose, l’autrice le rend attachant alors même qu’il nous est complètement étranger. 

Une histoire prenante malgré une fin un peu faible

Ensuite, La Cinquième Saison nous emporte dans une histoire rondement menée. Sans temps mort, il n’y a pas eu de moments où je me suis ennuyée. Au contraire ! La plupart des passages débordent d’intensité. Si le choix narratif peut surprendre dans un premier temps, on s’y fait vite et il se prête à merveille à cette histoire plurielle qui n’hésite pas à jouer avec la notion d’identité.

Malgré une fin plutôt attendue, le scénario est bien construit. Les mystères sont bien dosés au fil de l’histoire, participant à la construction d’un univers qui semble avoir beaucoup de choses à cacher. Certains passages sont assez durs, meurtres et viols font partie de cet univers impitoyable. 

La cinquième saison, classique en devenir ? Sûrement

La Cinquième Saison vaut bien ses prix ! Son principal attrait lui vient de son univers. Vaste, violent mais cohérent, on a constamment envie d’en savoir plus. Le tout est servi par une galerie de personnages crédibles, aussi rugueux et ambivalents que le monde dont ils sont issus. Mon unique bémol concerne une fin trop attendue et certains arcs narratifs que j’ai jugés un peu faibles en comparaison du reste du récit. 

Note : 18/20

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Catégories : Chroniques

5 commentaires

Magali · 14 mai 2019 à 14 h 18 min

Je l’avais bien aimé aussi!
C’est intéressant ce que tu dis sur la présence d’éléments de science-fiction et fantasy. Je l’ai aussi trouvé un peu inclassable, même si je penchais plus vers la fantasy, mais avec un soupçon que l’aspect science-fiction risque de se développer plus dans les tomes suivants.

    LaGeekosophe · 15 mai 2019 à 21 h 10 min

    En effet, ce mélange des genres m’a surprise mais c’était bien fait et cohérent !

    Il y a d’autres gens qui le considèrent plus comme de la SF avec un soupçon de fantasy 😉

Babitty Lapina · 17 mai 2019 à 6 h 36 min

Je ne l’aurais pas lu, mais ta chronique me donne envie de lui donner une chance ! Je comprend tout à fait ton sentiment de lire ou pas un livre dont on parle trop. Généralement ce que je fais dans ce cas, c’est que je me concentre sur quelques blogs dont je sais que je peux me reposer les yeux fermés (dont le tient !) pour décider si je donne une chance à ce roman ou non.

    La Geekosophe · 18 mai 2019 à 11 h 13 min

    J’aime bien passer après la hype haha ! Après, c’est aussi beaucoup un tout : un synopsis que je ne trouve pas très alléchants, des critiques à contre-courant de blogueurs que j’aime bien, trop de mises en avant… Mais La Cinquième Saison est une belle oeuvre qui amorce une trilogie qui s’annonce passionnante !

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