Le mois de mai aura été occupé par un roman bien long ! Ceci dit, entre fantasy et SF, j’ai adoré les nouveaux romans que j’ai pu lire. Les auteur que je connais déjà me surprennent de par leur créativité dans le fond comme dans la forme, et les nouvelles plumes séduisent en proposant des univers qui sortent de ce qu’on voit habituellement. C’est donc un mois de mai satisfaisant pour moi.
L’âme de l’empereur de Brandon Sanderson
La jeune Shai a été arrêtée alors qu’elle tentait de voler le Sceptre de Lune de l’Empereur. Mais au lieu d’être exécutée, ses geôliers concluent avec elle un marché : l’Empereur, resté inconscient après une tentative d’assassinat ratée, a besoin d’une nouvelle âme. Or, Shai est une jeune Forgeuse, une étrangère qui possède la capacité magique de modifier le passé d’un objet, et donc d’altérer le présent. Le destin de l’Empire repose sur une tâche impossible : comment forger le simulacre d’une âme qui serait meilleur que l’âme elle-même ? Shai doit agir vite si elle veut échapper au complot néfaste de ceux qui l’ont capturée.
Brandon Sanderson est-il capable d’écrire un roman réellement mauvais ? Ici, il parvient à créer des personnages mémorables et un système de magie ingénieux en moins de 200 pages. Mêlant magie de modification de la réalité, intrigues à la cour et huis-clos avec compte à rebours, l’histoire parvient à créer de la tension à travers les échanges entre les protagonistes. Le roman interroge, à travers les jeux de la cour et la Falsification, la notion de ce qui est réel et sincère et de ce qui est factice. Evidemment, l’un et l’autre défient nos idées préconçues, notamment dans ce qui se cache derrière les motivations les plus viscérales et cachées.
Nos jours brûlés, tome 1 de Laura Nsafou
Depuis vingt ans, le soleil a disparu et le monde est plongé dans la pénombre. La faune et la flore se sont peu à peu adaptées, et les espèces nocturnes, multipliées. Pour les humains, s’éclairer, se nourrir, survivre sont devenus des défis quotidiens. Elikia, née peu après l’avènement de la Grande Nuit, et sa mère Diba, se sont fixé pour mission de ramener le jour sur le monde. Persuadées que la disparition du soleil est liée à celle de Juddu, une ancienne et mystérieuse cité ayant abrité des esprits et des individus dotés de pouvoirs, toutes deux sillonnent le continent africain dont elles sont originaires à la recherche de témoignages. Les récits glanés auprès des Anciens les conduisent jusqu’à l’Adamaoua, une montagne où nulle âme sensée n’oserait s’aventurer…
J’ai plutôt apprécié ma lecture. Si le ton et les péripéties sont axés Young Adult, l’autrice aborde également des thématiques violentes avec maturité. Le point fort du livre est sa mise en place d’un univers entre SF et fantasy dans une Afrique post-apo, mais avec des éléments magiques qui permettent à Laura Nsafou de construire toute une mythologie qui lui est propre. Sans me marquer durablement, je le trouve original et bien mené, notamment grâce aux mystères qui entourent certains événements ou le caractère bien trempée de son héroïne.
Anthologie des Utopiales 2024
Les festivals des Utopiales et le plus grand festival de science-fiction du monde. Et voici son anthologie officielle ! Elle rassemble onze auteurs et autrices invités par le festival sur la thématique de cette année, « l’Harmonie ». Ils et elles ont écrit de formidables nouvelles de science-fiction sur le sujet. Au sommaire, la fine fleur de l’imaginaire en France.
L’harmonie est quelque chose que la SF nous offre peu. L’utopie est un genre qui se faire rare et le conflit est un resosrs majeur des histoires depuis que le conte existe. J’ai apprécié de voir comment cette notion pouvait se décliner de différentes façons pour explorer des genres multiples. Les plumes sont en général de qualité, proposant des sujets souvent intimes et engagés. D’autres détonnent par leur gouaille assumée. Cependant, certaines d’entre elles manquent d’un propos fort, d’une chute marquante ou s’éloignent trop de la SF, ce qui rend certaines parties de cette anthologie inégales.
Le regard de Ken Liu
Dans son registre, celui de l’investigation, Ruth Law est la meilleure. D’abord parce qu’elle est une femme, et que dans ce genre de boulot, on se méfie peu des femmes. Parce qu’elle ne lâche rien, non plus, ne laisse aucune place au hasard. Enfin, parce qu’elle est augmentée. De manière extrême et totalement illégale. Et tant pis pour sa santé, dont elle se moque dans les grandes largeurs — condamnée qu’elle est à se faire manipuler par son Régulateur, ce truc en elle qui gère l’ensemble de ses émotions, filtre ce qu’elle éprouve, lui assure des idées claires en toute circonstance. Et surtout lui évite de trop penser. À son ancienne vie… Celle d’avant le drame…
Et quand la mère d’une jeune femme massacrée, énuclée, la contacte afin de relancer une enquête au point mort, Ruth sent confusément que c’est peut-être là l’occasion de tout remettre à plat. Repartir à zéro. Mais il faudra pour cela payer le prix.
Le prix de la vérité libérée de tout filtre, tout artifice. Tout regard…
Le regard est un court récit. Polar technologique, il met en avant les laisser-pour-compte d’une société qui mise sur le transhumanisme : implants pour contrôler les émotions, se doper, mini-caméras pour espionner… La technologie amène de nouvelles possibilités de commettre des crimes, mais aussi d’enquêter. Avec une détective âpre à la tâche détruite par un événement tragique, Ken Liu réutilise les lieux communs du thriller cyberpunk mais en remaniant certains aspects pour proposer une œuvre dynamique et plus profonde qu’il n’y paraît, bien que l’on n’atteigne pas la même significativité d’un format plus long.
Les lions d’Al-Rassan de Guy Gavriel Kay
L’empire d’AI-Rassan a fait de ses conquérants asharites, venus des sables du désert, un peuple d’artistes et de savants ; l’assassinat du dernier calife a entraîné son éclatement en cités-Etats rivales. Seul peut-être le roi Almalik de Cartada saura lui rendre sa puissance et son unité, avec le soutien du légendaire Ammar ibn Khairan, poète, diplomate et soldat. Car une autre menace pèse sur l’AI-Rassan, celle des royaumes jaddites du nord de la péninsule, divisés, certes, mais avides de reconquérir le pays dont ils s’estiment dépossédés. Rodrigo Belmonte est le plus prestigieux de leurs chefs de guerre. C’est dans l’exquise cité de Ragosa que se rencontreront Ammar et Rodrigo, pour un temps exilés au service du même monarque. Entre eux, la figure exceptionnelle de Jehane bet Ishake, fille du peuple Kindath et brillant médecin.
Je comprends pourquoi ce roman est considéré comme l’oeuvre la plus marquante de l’auteur. Livre dense et puissant, Les lions d’Al-Rassan nous entraîne dans des querelles politiques inspirées des relations entre l’Europe et les royaumes maures. Avec une plume acérée et évocatrice, Guy Gavriel Kay dépeint les luttes de mondes en plein changement : les communautés nordiques retrouvent vigueur face aux asharites divisés. Il raconte l’histoire de deux grands hommes, supposés dans des camps opposés, qui se retrouvent au même lieu, au même moment, comme un moment suspendu. L’auteur dépeint parfaitement les figures qui façonnent l’histoire, hommes comme femmes exceptionnelles. Le récit est doté de nombreux rebonsissements, mettant en scène de nombreux personnages mémorables, n’hésitant à nous déchirer le coeur; J’ai peut-être regretté certains éléments trop proches de notre réalité, qui troublent les aspects fantasy.
Et vous, quels sont vos romans du mois ?
1 commentaire
tampopo24 · 1 juin 2025 à 14 h 52 min
Effectivement de sacrés auteurs et univers se sont offerts à toi en ce mois de mai !
Coup de coeur pour les Lions d’Al-Rassan ici, justement parce que c’est une fantasy proche de nous <3
Beau mois de juin, je suis curieuse de voir les rencontres que tu vas encore y faire !