Bienvenue dans cette nouvelle chronique de la Geekosophe, portrait d’artiste. Régulièrement, nous nous intéresserons à un artiste ayant marqué la pop-culture à sa façon. La pop-culture est protéiforme. La photographie fait partie de ces arts qui peuvent critiquer et éclairer notre société avec une acuité et un impact que seule l’image peut donner. C’est pour cela que j’ai décidé de me lancer à l’assaut d’un grand nom de la photo, David LaChapelle. Photographe pop aux mille visages, l’artiste est parvenu à créer un univers unique doté de plusieurs lectures, entre kitsch et érotisme.
Partie 1 : biographie
Un enfant de la photo
David LaChapelle est né à Hartford dans le Connecticut. Très jeune attiré par les arts et encouragé par sa famille, il s’épanouit dans les programmes scolaires qui y sont dédiés et en gardera un souvenir chaleureux malgré des problèmes de harcèlement scolaire (un point particulièrement courant dans de nombreuses biographies de stars). Il tente sa chance à New York où il s’inscrit à l’association des étudiants d’art et à l’école des Arts visuels. Dans une situation précaire, il vit dans une auberge de jeunesse et travaille comme serveur au Studio 54.
C’est en 1984 , alors qu’il n’a que 19 ans, qu’il est repéré par le Dieu de la pop-art lui-même, Andy Warhol. LaChapelle sera profondément influencé par la pop-art tout au long de sa carrière. C’est également au même moment qu’il affrontera la mort de son compagnon séropositif. S’il ne souhaitait pas publié dans des magazines, Warhol le convainc de publier dans Interview, sa propre parution.
Le photographe de mode le plus connu des années 90
Interview modifie profondément sa conception de la photographie. Que son travail paraisse dans des magazines de mode devient un objectif en soi. Dans ce cadre, il se lance dans le Porno-chic, très en vogue à l’époque. Les magazines de luxe en raffolent et le travail de LaChapelle explose. Il se distingue par des couleurs vives, saturées à l’extrême, une mise en scène parfois très inspirée de l’histoire de l’art.
Jusqu’à sa retraite du monde de la mode en 2005, LaChapelle n’aura de cesse de prendre en photo le plus de personnes possibles. Toutes les stars seront passées devant son objectif. Couvertures de magazines, d’albums, expositions… Il mêle art et grand public avec un brio qui étonne, choque et surprend.
Aujourd’hui, une vie consacrée à l’art
En 2005, 2006, LaChapelle annonce sa retraite. A 48 ans, il quitte l’univers des magazines de mode pour se consacrer à la photographie d’art (ouiii). Depuis il enchaîne les expositions dans les plus grandes galeries du monde entier : Paris, New-York, Séoul… C’est la consécration pour un artiste qui avait vu, à ses débuts, ses photos qualifiées de superficielles et matérialistes.
Partie 2 : David LaChapelle hait qu’on lui dise qu’il a un style mais
Un graphisme particulier
L’art de LaChapelle se distingue en coup d’œil, notamment par ses couleurs ultra-saturées. L’image frôle parfois le criard, tant les teintes sont exagérées, irréelles, forcées. Il y a sans doute un lien très fort entre le superficiel et l’artificiel du star-sytem et cet usage presque publicitaire de la vivacité de la couleur. Certaines photos, surchargées de détails, prennent presque l’aspect d’un bonbon un peu écœurant, et nous laisse sur un sentiment mêlé de fascination et d’une sorte de dégoût ténu mais présent.
Des thèmes empruntés au pop-art
Digne représentant du pop-art, LaChapelle en reprend les idées. Le consumérisme, objet de fascination, est un thème récurrent. Le photographe n’hésite pas à pointer du doigt (ou de l’objectif) les dérives de la consommation à l’occidentale. Il peut de manière directe, par exemple grâce à cette très célèbre photo de mannequin littéralement écrasée par un hamburger géant :
Comme la soupe Campbell pour Warhol, LaChapelle n’hésite pas à utiliser les symboles de la grande consommation qui font partie de notre époque. Ou de manière détournée en exprimant continuellement sa fascination pour les stars, icônes d’aujourd’hui. L’art de LaChapelle est cynique et plus récemment il n’a pas hésité à mettre en scène le pillage de l’Afrique par l’Occident, notamment avec « le viol de l’Afrique« , réinterprétation moderne d’une oeuvre de Botticelli.
Enfants soldats, homme blanc alangui sur un tas d’or, le décors est vite planté
L’harmonie des anciens et des modernes
Si David LaChapelle a autant de succès, c’est sûrement grâce à son sens marqué de la modernité qu’il marie avec des symboles traditionnels avec un certain panache. Les références christiques sont notamment légion, entre grandeur et décadence. Souvent, ses modèles sont placés en Icônes religieuses modernes comme si le star system était devenu culte en soi face aux Eglises déclinantes. Culte du paraître, son imagerie se construit en paradoxes.
Le photographe a également été grandement influencé par les peintures classiques. Cela s’en ressent donc grandement dans certaines œuvres dont la nudité est empruntée aux tableaux de la Renaissance. L’artiste lui-même avait notamment mis en avant qu’un apprenti photographe devait connaître les grandes créations artistiques du passé pour que leur propre art soit réellement significatif.
Conclusion : Une influence durable
David LaChapelle continue de fasciner. Ses photos de stars ont marqué le milieu People et nombreuses sont ses oeuvres en la matière qui sont devenues cultes. Par exemple, le shooting Whitney Houston est réellement une référence dans le milieu. D’autres artistes ont ainsi des influences palpables de LaChapelle. Utopia, la fameuse série britannique, possède les mêmes teintes saturées que certaines photos du photographe. Elle possède également cette critique acide du consumérisme.
L’univers de Katy Perry, bariolé et pop, emprunte également beaucoup à LaChapelle. L’un de ses derniers titres, « Bon appétit« , est en effet bien trop semblable à la photo de nu de Naomi Campbell pour n’être qu’un hasard.
Cet article est écrit dans le cadre du café des blogueuses ! Voici donc 3 blogs à suivre :
Monkey dose : Très bon blog de deux photographes ! Venez suivre des sujets variés, au fil des humeurs et des infos insolites
Sweet Judas : le blog culture qui aime parler hémoglobine, frissons et cris ! Un ton qui change et une blogueuse qui ne nous prend pas pour des quiches
L’alcôve de Lisa : Un bébé blog plein de promesses ! Entrez dans l’univers Gothique et romantique de Lisa 🙂
2 commentaires
Sweet Judas · 9 novembre 2017 à 15 h 33 min
Je suis arrivée là par curiosité (merci pour le lien en bas de page, c’est chontil tout plein !) et je repars avec le nom du mec à l’origine de cette photo du hamburger gonflable… Elle m’avait beaucoup interrogée, à l’époque. C’est toujours mieux d’avoir un contexte, concernant les œuvres d’art et expérimentations photographiques. « Le Viol de l’Afrique » a un effet beaucoup plus coup de poing que les autres, je trouve (c’est un résumé de la situation tellement bien expédié…).
P.S. : Je savais bien que le clip de Katy Perry me parlait, aussi. Mais je n’aurais jamais fait le rapprochement avec le cliché de Naomi sans ton billet. C’était la minute culture de la journée, merci 🙂
David LaChapelle, el Magritte de la fotografía - Arte Contemporáneo · 12 mars 2020 à 22 h 30 min
[…] La geekosophe (2017). “David LaChapelle, portrait d’un photographe pop-art”. La geekosophe. Recuperado el 11 de marzo de 2020 de https://lageekosophe.com/2017/06/24/david-lachapelle-photographe-pop-art/ […]