Un mois d’août marqué par des lectures mémorables, chaque roman à sa manière. Entre engagement, questionnements philosophiques et éthiques, les récits de SF montrent vraiment toute l’ampleur de la réflexion qu’ils peuvent apporter. Vous êtes prêts à découvrir mes lectures du mois écoulé ?
Le dit d’Aka d’Ursula Le Guin
Sutty, l’Indienne, est envoyée par la confédération galactique sur une planète récemment contactée, Aka.
Aka connaît un équilibre fragile. La découverte de l’existence d’une civilisation galactique, l’Ekumen, a tiré Aka de sa culture demeurée statique depuis des millénaires.
Une société furieusement scientiste a entrepris de rattraper ce qu’elle tient pour son retard, et est allée jusqu’à éradiquer les anciens contes et livres, vecteurs de superstition selon ses dirigeants.
Sutty elle-même vient de la Terre, un monde qui a connu une violente réaction fondamentaliste et antiscientifique dont il s’extrait à peine. Peut-être, pour cette raison, est-elle la mieux placée pour retrouver et sauver ce qui peut l’être de la vieille culture contenue dans le Dit d’Aka.
Et réconcilier le passé et l’avenir.
Ursula Le Guin présente, comme souvent avec ses sagas, une œuvre intellectualisée. Aka est le théâtre d’une lutte idéologique profonde. Cette opposition des idées pousse le lecteur à la réflexion sur la société : qu’est-ce que la connaissance ? Qu’apportent les légendes à une société ? La violence politique pour le progrès est-t-elle justifiée ? L’émotion n’est cependant pas absente. Le personnage principal, Sutty, est bien caractérisé, entre failles et force de conviction. L’autrice met en opposition un monde fondamentaliste et un autre progressiste, et montre dans les deux cas les ravages de l’extrémisme. Elle le fait grâce à cet outil puissant qu’est le dialogue, qui rappelle ici des échanges philosophiques profus, soulignant la subtilité de la pensée.
Notre part de nuit de Mariana Enriquez
Un père et son fils traversent l’Argentine par la route, comme en fuite. Où vont-ils ? À qui cherchent-ils à échapper ?
Le petit garçon s’appelle Gaspar. Sa mère a disparu dans des circonstances étranges. Comme son père, Gaspar a hérité d’un terrible don : il est destiné à devenir médium pour le compte d’une mystérieuse société secrète qui entre en contact avec les Ténèbres pour percer les mystères de la vie éternelle.
Notre part de nuit de Mariana Enriquez ne manque pas d’arguments en sa faveur ! C’est un récit horrifique glaçant, mêlant ésotérisme et body horror. L’autrice y ajoute une touche historique, le parallèle entre les victimes de la secte vénérant l’Obscurité et la dictature argentine est clair. De plus, l’écriture macabre de l’autrice apporte une ambiance vraiment unique, revisitant les classiques du récit d’horreur. Malgré cela, j’ai eu un peu de mal avec la relation père / fils, dont les aspects les plus violents m’ont laissé avec un profond malaise. De même, il y a quelques longueurs qui ont rendu mon avancée parfois laborieuse.
Les choses immobiles de Michael Roch
Au décès de son père, un jeune homme revient a la Martinique. Accueilli par son frère, il va découvrir l’envers d’une île que la France abandonne, une île en proie a des bouleversements écologiques et sociaux, une île ou tout a définitivement change … comme lui. Poursuivi par ses démons hexagonaux et les visions d’une étrange anguille spectrale, Charles va s’engager peu a peu, entre relations fraternelles tendues et amours multiples, aux côtés des indépendantistes.
« Les choses immobiles » mêle habilement l’intime et le contexte plus large de la future société martiniquaise. L’auteur offre une plongée émotionnelle dans les conflits internes de ses personnages tout en offrant un aperçu subtil des enjeux sociaux et environnementaux qui façonnent le destin de l’île. L’auteur tisse un récit captivant en utilisant une narration fragmentée et des paragraphes incisifs qui capturent des moments clés de l’histoire. L’île, en proie aux conséquences des négligences françaises et à des enjeux écologiques, se manifeste en arrière-plan. Cependant, cet aspect fragmenté et l’écriture complexe peuvent rendre ce récit difficilement accessible à des lecteurs qui n’ont pas l’habitude des œuvres de l’auteur.
Xenogesis tome 1 : l’aube d’Octavia E. Butler
La Terre a été dévastée par une guerre nucléaire. Les humains ont été sauvés par un peuple extraterrestre, les Oankali, qui les ont emmenés dans leur vaisseau spatial. Parmi les survivants se trouve Lilith Lyapo, endormie depuis plusieurs siècles et qui se réveille à peine. Les Oankali acceptent de faire revenir les humains sur Terre à condition qu’ils conçoivent un enfant hybride.
Un roman rare, d’une grande sensibilité et d’une grande finesse. Octavia Butler aborde la thématique de l’altérité et de la survie de l’humanité à travers l’histoire de Lilith. Lilith est une figure forte, partagée entre la méfiance et son empathie pour les oankalis, une race bienveillante mais ambiguë, constamment dans une forme de manipulation, de domination, douce. Le personnage principal est désignée comme le chef, mais sa position révèle vite les affres de l’humanité, profondément violente, posant la question de la nécessité de conserver les humains comme elle est.
Quel est votre lecture la plus marquante d’aout ?
2 commentaires
Shaya · 9 septembre 2023 à 18 h 05 min
Un beau mois pour toi en tout cas, je te souhaite la même chose pour septembre, en mieux !
La Geekosophe · 13 septembre 2023 à 0 h 00 min
Merci beaucoup, le démarrage est un peu poussif malheureusement, mais les lectures s’annoncent sympathiques