Octobre apporte son lot de lectures de saison ! Mais pas que… Si cette année je me suis plongée dans du thriller horrifique et du gothique, je me suis diversifiée vers d’autres genres ! Avec un retour vers une de mes autrices fétiches de mon adolescence, ou la découverte d’une nouvelle plume francophone qui ne manque pas de bagout.
Les somnambules de Chuck Wendig
Dans un petit village de Pennsylvanie, Shana surprend sa sœur, Nessie, quittant d’un pas résolu leur maison. Lorsqu’elle tente de l’intercepter, la petite fille ne réagit pas à sa présence. Mutique, absente, le regard vide, elle avance… Croyant à une crise de somnambulisme, Shana commence à la suivre. Rapidement, elles sont rejointes par un deuxième errant, frappé des mêmes symptômes que Nessie. Puis un autre. Bientôt, ils sont des centaines à converger vers la même destination inconnue, tandis que leurs proches, impuissants, leur emboîtent le pas. Mais leur traversée du pays réveille la violence qui sommeillait au cœur de la société américaine. Et si certains sont terrorisés par la menace d’une épidémie mystérieuse, d’autres y voient l’opportunité d’imposer leur vision du monde, à n’importe quel prix.
Ce marathon littéraire de 1300 pages reste captivant grâce à une écriture nerveuse et des rebondissements bien orchestrés. L’intrigue, tissant pandémie, intelligence artificielle, politique et religion, rappelle la maestria de Stephen King. Les divers points de vue, du CDC aux familles des somnambules, ajoutent une richesse narrative, tandis que des protagonistes détestables enrichissent la complexité du récit. En somme, « Les somnambules » transcende les genres, plongeant dans une réalité déformée, à la fois troublante et intrigante.
Récitatif de Toni Morrison
Twyla et Roberta ont huit ans lorsqu’elles se rencontrent au foyer de St-Bonaventure. L’une est noire; l’autre est blanche. Quatre mois durant, les deux fillettes resteront inséparables, avant que la vie ne les éloigne. Des années plus tard, elles vont se recroiser brièvement, à plusieurs reprises, chaque fois dans des circonstances très différentes. Des retrouvailles souvent malaisées, jetant une lumière trouble sur un épisode de leur enfance, une scène en apparence anodine mais dont le souvenir ne les a jamais quittées – si tant est que ce souvenir soit fidèle à ce qui s’est réellement passé ce jour-là…
Récitatif reflète l’intelligence et la finesse de Toni Morrison. Récit de deux jeunes femmes de couleurs différentes dans une Amérique secouée par le conflit racial, on ne saura jamais laquelle est noire, laquelle est blanche. L’œuvre interroge nos préjugés culturels, nous poussant à nous demander pourquoi telle caractéristique serait associée à une personne blanche plutôt qu’une noire. L’écriture est d’une grande finesse et fait la part à l’émotion dans cette relation atypique qui relie Twyla et Roberta, hantées par un passé dont elles n’ont pas les mêmes souvenirs.
La fille qui se noie de Caitlin R. Kiernan
India Morgan Phelps est schizophrène. Elle a de qui tenir, puisque sa mère et sa grand-mère souffraient toutes les deux de troubles mentaux et ont mis fin à leurs jours. Les médicaments l’aident à garder un semblant de contrôle et pour tenter de comprendre les événements qui ont bouleversés sa vie, elle entreprend de rédiger un récit autobiographique, qui va curieusement prendre la forme d’une histoire de fantômes. C’est le meilleur moyen qu’elle a trouvé pour faire partager ce qui la hante. Car India semble obsédée par sa rencontre avec Eva Manning, une femme qui ressemble trait pour trait au tableau qui l’obnubile depuis son enfance, La fille qui se noie. Elle a déjà vu Eva par le passé, sous la forme d’un fantôme d’un loup-garou. A moins qu’elle ne l’ait jamais vu. Qui sait ce que sa schizophrénie lui fait voir ?
Dans cette plongée captivante au cœur de la psyché tourmentée d’India Morgan Phelps, Caitlin R. Kiernan nous offre un récit intense. La Fille qui se noie se révèle être bien plus qu’une simple histoire de fantômes contemporaine. À travers le prisme déformant de la schizophrénie, l’autrice tisse un labyrinthe étrange et fascinant où la frontière entre réalité et imagination s’efface. Le style unique de Kiernan, qui reflète avec subtilité la gradation des troubles mentaux d’India, enveloppe le lecteur dans une atmosphère à la fois déconcertante et envoûtante. La protagoniste, Imp, se dévoile comme une artiste tourmentée, capable de voir au-delà de la réalité ordinaire. Son regard complexe sur le monde, teinté d’une sensibilité artistique profonde, soulève des questions universelles sur le lien entre la création artistique et la santé mentale.
Le flambeau d’Agatha Christie
Un meurtre futur reflété dans un miroir ; un héritier gênant changé en matou docile ; une religieuse qui tue à distance et à volonté…
Ces histoires-là auraient pu être des énigmes policières ; elles ont en la construction, le suspense… Pourtant, les limiers de Scotland Yard y chercheraient en vain les indices chers à leur cœur. Ici, point de traces de pas, d’emplois du temps truqués ou de mégots tachés de rouge. Les Esprits sont bien au-dessus de ces contingences qui nous turlupinent, nous, simples mortels...
J’avais choisi ce recueil de nouvelles pour lire à la période d’Halloween ! Et en effet, c’est très adapté. Ceci dit, comme beaucoup de recueil de nouvelles, j’ai trouvé les textes inégaux. Beaucoup ont une part de fantastique et de paranormal en eux, avec cette fascination pour les séances de spiritisme ou l’orientalisme, parfois avec un côté gothique. Ce ne sont cependant pas les meilleurs textes de la reine du crime, je les pense réserver à des fans de la première heure, curieux de découvrir Agatha Christie dans un autre registre.
Les bras de Morphée de Yann Bécu
Et vous ? Que feriez-vous de votre temps si vous dormiez 20h par jour ?
Voici un futur proche où l’on veille en moyenne quatre heures par jour à cause d’un étrange virus. En amour, à l’école, au travail, la routine a forcément l’allure d’un sprint : faire vite, faire court, ne pas trop ramener sa fraise… Trois lois sacrées que Pascal Frimousse, ex professeur de français, profane au quotidien. Avec ses 12 heures de veille, il est une perle rare. Mais à dormir si peu quand le reste de Prague sommeille, on s’ennuie ferme. Alors, pour passer le temps, quoi de mieux que de voler celui des autres, devenu leur bien le plus précieux ? L’essence même du trollage, en somme…
Créatif, drôle et original, j’ai aimé la plongée truculente dans l’univers décalée de Yann Bécu. Face à un monde qui dort plus que d’ordinaire, la société se réorganise tant bien que mal. Pas le temps d’approfondir, tout doit être synthétique et efficace. Évidemment, l’info se perd de manière hilarante, entre approximations historiques ou littéraires. Le temps est devenu la ressource la plus précieuse, notamment pour les marmottes, qui ne bénéficient que de quelques heures de veille. Mais la situation a aussi son lot de drames, avec des couples et des familles qui ne se parlent plus depuis des années. Pascal Frimousse est un personnage sympathique, taquin et plein de ressources, tout comme son pote Michel. C’est un plaisir de les suivre. J’ai trouvé cependant parfois que le scénario traînait en longueur.
Quelles sont vos lecteurs marquantes du mois d’octobre ?
3 commentaires
tampopo24 · 1 novembre 2023 à 13 h 37 min
Une belle diversification !
J’avoue que le Flambeau m’intrigue et j’aurais craqué si Somnanbules n’était pas si long xD
Beau mois de novembre
La Geekosophe · 4 novembre 2023 à 13 h 42 min
J’avais ajouté Les somnambules à plusieurs challenges pour me pousser à le lire cette année 😀
tampopo24 · 4 novembre 2023 à 17 h 06 min
Tu as de la suite dans les idées ^^