Borne de Jeff Vandermeer fait partie des livres que l’on m’a conseillés cette année ! Le résumé avait l’air barré, du coup je n’ai pas beaucoup tardé à l’acheter. J’aime beaucoup les histoire de SF qui poussent leur concept loin au-delà de leur limite. Ce roman est une fable horrifique mêlant biotech, body horror et humanité.

Chronique de Borne

Dans une ville en ruine, détruite par la sécheresse et les conflits, et où les hommes survivent comme des charognards, Rachel trouve Borne lors d’une mission de récupération. Elle le ramène chez elle. Borne est une masse verte vivante, plante ou animal, et dégage un étrange charisme. Mère refoulée, Rachel garde Borne et s’y attache comme à un enfant. Doué d’empathie, il montre à Rachel la beauté dans la désolation qui l’entoure. Et alors que la créature grandit et commence à menacer l’équilibre du pouvoir dans la ville, elle modifie profondément les perceptions et les émotions de ceux qu’elle côtoie.

Un récit étrange et captivant

Survivre un monde en décomposition

Ce qui frappe dès les premières pages de ce roman inhabituel, c’est l’étrangeté du monde dans lequel les protagonistes évoluent. On vous le dira dans d’autres chroniques, mais l’entrée en matière est complexe. Nous entrons in medias res aux cotés de Rachel. C’est une récupératrice de matériel biologique. Elle explore chaque jour un univers dangereux atteint d’un sécheresse éternelle. Les humains survivent grâce à la biotechnologie, qu’ils utilisent pour créer des pièges ou des armes, ou pour se modifier d’une manière qui frôle le body horror. L’ensemble crée une atmosphère singulière et angoissante, notamment car nous n’avons toutes les cartes en main pour comprendre cet univers qui semble à bout de souffle.

Le sentiment est d’autant plus oppressant que certains éléments distillés par l’auteur donnent à penser à un conte onirique macabre. Ainsi, l’une des créatures les plus dangereuses de La Ville est un ours modifié d’une taille gigantesque capable de voler (??). Si cela peut sembler risible, la suspension d’incrédulité est aidée par le sentiment de danger profond qui semble hanter les protagonistes à la mention de Mord, le fameux ours géant. Mais il n’est pas le seul danger qui hante cette étrange cité, puisque des factions comme celle de la Magicienne ou les relents d’une étrange Institution se partagent les relents de cette ville décomposée, où charognards et survivants se disputent.

Qu’est-ce qu’être une personne ?

L’auteur instaure une sorte de huis-clos. Il se concentre sur les relations entre un trio de personnages qui interagissent exclusivement entre eux. Rachel la récupératrice, Wick le dealer et Borne, l’indescriptible. C’est bien sûr la relation étrange qui lie Borne et Rachel qui fait le cœur du récit. Borne est un être profondément dérangeant. De forme indéfinie et changeante, il évolue de plante à autre chose, posant sans cesse la question de sa nature profonde. Aussi fascinant que repoussant, on comprend que Rachel se prenne d’affection pour cette créature, qui au début parle comme un enfant, avec naïveté et joie. Rachel le voit évoluer avec une forme de tendresse, nouant un lien inexplicable et puissant.

La question centrale du récit, celle qui revient régulièrement, est la notion d’humanité. Borne posera cette question à plusieurs reprises, cherchent à déterminer s’il est une personne. Tout comme dans le cyberpunk, tant de modifications peuvent entrainer des interrogations sur ce qui fait de nous des êtres humains. Dans un univers biotech, la question en devient encore plus tordue. Peu des survivants semblent être très humains, car même Wick et Rachel peuvent sembler bien peu entrer dans cette définition. Mais alors que penser de Borne, capable de communiquer, d’aimer et de haïr ?

Borne est un roman parfait pour les amateurs de SF expérimentale

Borne est un récit ambitieux et marquant, qui propose une SF organique, horrifique et humaniste. L’auteur réussit à instaurer un sentiment oppressant en introduisant des éléments qui évoquent un conte onirique macabre. L’ours géant volant, Mord, et les diverses factions qui se disputent le contrôle de la cité décomposée contribuent à créer une tension palpable. Jeff VanderMeer opte également pour un huis-clos, en se concentrant sur les relations entre un trio de personnages : Rachel, la récupératrice, Wick, le dealer, et Borne, l’être indescriptible. La relation étrange entre Rachel et Borne constitue le cœur du récit. Borne, créature au corps changeant et énigmatique, pose la question fondamentale de sa propre humanité. À travers ce personnage fascinant et dérangeant, l’auteur explore les limites de l’identité et interroge ce qui définit notre humanité, notamment dans un monde où les modifications biotechnologiques sont monnaie courante.

Note : 17/20

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Catégories : Chroniques

4 commentaires

Sometimes a book · 20 mai 2023 à 11 h 44 min

Très contente que tu l’ais apprécié !

    La Geekosophe · 20 mai 2023 à 23 h 54 min

    Une très bonne découverte ! Je le recommande à tous les amateurs de SF expérimentales de mon entourage

Shaya · 27 mai 2023 à 18 h 28 min

Pas sûre d’apprécier, ça n’avait pas bien marché pour les précédents romans de l’auteur pour moi, donc bon, on va voir !

    La Geekosophe · 3 juin 2023 à 10 h 34 min

    C’est sûr que ce n’est pas le genre de roman que je recommanderais à tout le monde, un peu comme les romans d’Ada Palmer, il faut aimer l’expérimental ! Mais là c’est encore plus barré

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