Je poursuis ma liste de lectures conseillées pour l’année 2024 ! J’aime beaucoup lire des thrillers pendant l’été, c’est donc avec joie que je me suis lancée dans le premier tome de W3, le sourire des pendus, rédigé à quatre mains par Jérôme Camut et Nathalie Hug. Ce beau pavé de 808 pages nous entraîne dans une enquête à tiroirs qui aborde de nombreuses problématiques sociales sous un angle souvent dérangeant.
Cette lecture entre donc les pavés de l’été.
Synopsis de Le sourire des pendus
Lara Mendès, jeune chroniqueuse télé, enquête sur le marché du sexe et ses déviances. Elle disparaît sur un parking d’autoroute…
Désemparés par la lenteur de l’enquête, ses proches reçoivent le soutien de Léon Castel, fondateur d’une association de victimes. Sa fille Sookie, policière hors norme, a enquêté sur une triple pendaison qui semble liée à cette affaire. Qui a enlevé Lara ? Pourquoi ? Où sont passés ces enfants et ces jeunes femmes dont les portraits s’affichent depuis des mois, parfois des années, sur les murs des gares et des commissariats ? Réseaux criminels ou tueurs isolés ? Partout, le destin d’innocents est broyé sans pitié. Ils auront bientôt une voix : W3.
Plongée glauque entre trafic humain et porno
Explorons des recoins obscurs
Le sourire des pendus lance plusieurs enquêtes troublantes ayant pour point commun des disparitions de très jeunes filles et des expériences sexuelles illégales. Lara Mendès fouille pour trouver une réponse à une affaire de meurtre et de disparition datant d’il y a plusieurs années. Est-ce pour cela qu’elle se retrouve enfermée dans un bunker, violée par un mystérieux bourreau ? Le duo d’auteurs n’hésite pas à mettre en scène des passages violents dans tous les sens du terme. Ils nous entraînent dans ce que l’humanité a de plus sombre en matière de pulsions, le tout simplifié par internet. Et parfois, la frontière entre pornographie et snuff movie est bien fine. D’autant plus lorsque les modes sexuelles tournent des vierges ou jeunes filles et garçons, entraînant un trafic humain horrible. A partir de ces sujets, Le roman installe une ambiance rance, malgré quelques moments d’humour, et souvent obscène.
Le roman s’attaque également à la presse. Celle des charognards en quête du moindre os à ronger pour faire la une ou faire le buzz. Lara Mendès, la jeune femme qui disparaît, fait un reportage qui l’intéresse en réalité assez peur résoudre son autre enquête, car le sujets légers sont plus en vogue. La justice est également égratignée, notamment à travers le personnage de Léon Castel. Soixantenaire éternellement rebelle, il traque les absurdités légales pour tenter de redresser les torts d’une justice devenue procédurière. On n’est donc pas dans un thriller qui n’est là que pour donner du suspense ou du sordide, mais aussi pour proposer une critique de certains aspects de la société. La lecture a donc plus de profondeur que ce à quoi on pourrait s’attendre.
Les poupées russes planquées dans des tiroirs
En plus de cela, le roman offre de multiples pistes. Le sourire des pendus est bien construit : il commence par exposer plusieurs situations qui n’ont a priori rien à voir : le meurtre brutal d’un couple d’avocat suivi de l’enlèvement de leurs filles. Une famille complète retrouvée pendue. L’enlèvement de Lara Mendès, jeune journaliste ambitieuse. Nous découvrons chaque affaire à travers le point de vue d’un grand nombre de personnages à travers des chapitres courts et bien rythmés. Cela rend la lecture agréable et sans temps mort. D’autant plus que le duo d’auteurs maîtrise bien les révélations données, les liens qui se créent et se développent petit à petit entre les différents personnages.
Ces derniers sont vraiment variés et certaines personnalités sont attachantes. J’ai notamment apprécié Léon Castel et sa fille Sookie, policière. Le premier officie dans une association d’aide aux victimes et la seconde est une enquêtrice taiseuse et obstinée. D’autres personnages m’ont cependant semblé plus clichés, ce qui aboutissait souvent à des dialogues qui manquent de naturel, voire mièvres par moments. Le style est efficace dans les moments de tension, mais quand la plume se veut plus sentimentale, les passages sont plus plats et manquent de relief. Est-ce car le contraste avec les moments plus durs est trop fort ? C’est en tout cas un défaut mineur dans ce récit mené tambour battant.
Le sourire des pendus, ou plongée dans le côté obscur du sexe
Thriller efficace, le sourire des pendus est ambitieux et bien orchestré. Les deux auteurs proposent une intrigue complexe et haletante qui déploie plusieurs pistes qui finissent par se rejoindre. La plume efficace met en scène une galerie de personnages variés et bien construits, malgré quelques profils peu crédibles ou des passages plus faibles en matière d’écriture. Le roman parvient à aborder de nombreux sujets de société avec cohérence, ce qui est un vrai tour de force : proxénétisme, trafic humain, porno, snuff movie, rigidité de la justice, sensationnalisme des médias… On sent que le livre souhaite aller plus loin que le divertissement. Enfin, l’ambiance est très immersive, avec des passages chocs et une impression d’obscénité diffuse.
Note : 17/20
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